Les Entéaux existent-ils?
«Les
plantes aussi ont une âme.»
«La Liaison avec les
êtres de la Nature ne doit
jamais être rompue.»
- Enseignement Universel -
Introduction
Les Occidentaux sont, de façon générale,
très sûrs de leur savoir intellectuel.
Pourtant,
le Savoir réel est uniquement le produit de
l’expérience vécue. De ce point de vue, s’il est beaucoup d’érudits
parmi les Occidentaux, il est beaucoup moins de réels Sachants.
L’érudition
n’est, pourtant, jamais qu’un savoir appris, lequel ne peut jamais
apporter à l’esprit – seul élément réellement
vivant en l’être humain, de réelles Valeurs.
Les « sociétés
primitives », qui, même s’ils ne le disent pas toujours ouvertement, semblent
« inférieures » à de nombreux Occidentaux, comportent souvent, en leur sein, des
êtres humains porteurs d’un réel Savoir expérimental et
traditionnel.
De ce fait, un
réel Savoir expérimental personnel a bien plus de Valeur qu’un savoir
théoriquement supérieur mais seulement appris.
Et parmi ceux qui
tirent leur Savoir de leur propre expérience vécue personnelle les
chamanes [l’on trouve aussi les
orthographes « chamans » (sans e) et « shamans » (commençant par s)]
occupent une place de choix.
Qu’est-ce que le
chamanisme ?
Le chamanisme,
du mot « samane » en langue toungouze (Sibérie), désigne un ensemble de
pratiques et d'expériences remontant à de nombreux millénaires, que l'on
retrouve dans diverses cultures (en Amérique du Nord et du Sud, en Sibérie, en
Scandinavie, en Europe orientale, en Asie centrale, en Afrique du Sud, en
Australie aborigène).
Le chamane,
quant à lui, est l'autorité spirituelle d'une communauté, qui guérit les
âmes et les corps en équilibrant les forces (spirituelles,
humaines, naturelles) présentes dans les différents plans de la Réalité, par le
moyen de l'« extase » et du sacrifice (animal, végétal ou minéral).
Voyant et
médecin de l’âme, le chamane absorbe parfois
des substances (le peyotl au Mexique et aux
états-Unis, l'ayahuasca en
Haute-Amazonie, l'Amanita muscaria – ou amanite tue-mouche - en
Sibérie), qui accélèrent son voyage à destination du Monde invisible. Le plus
souvent, il se passe, toutefois, de l'usage de ces produits, leur
préférant parfois des instruments de musique comme le tambour, dont les
rythmes aident l'esprit à se déplacer vers les différents niveaux « extra-ordinaires »
de la Réalité.
Le
néo-chamanisme, redécouverte du chamanisme originel et mouvement spirituel
et culturel, qui a suivi la remise en cause occidentale de la fin des années
soixante, s'efforce de prendre en compte la sensibilité écologique du
monde moderne et son besoin de revitalisation
spirituelle.
Jeremy Narby
Un jeune anthropologue américain,
Jeremy Narby, a découvert que les peuples indigènes de l’Amazonie
avaient une surprenante connaissance de nombreuses
plantes de la forêt amazonienne et connaissaient même la structure de l’ADN
bien avant les scientifiques occidentaux. Est-ce possible ? Son livre
« Le Serpent Cosmique » raconte comment
le dialogue entre deux modes de pensée peut aboutir à de troublantes
découvertes. Jeremy Narby nous incite à nous poser de nombreuses questions sur
les fondements mêmes de notre conception de la réalité, les moyens d’accéder au
véritable Savoir.
En 1985, le jeune anthropologue
Jeremy Narby, rempli d’excellentes intentions morales, part en Amazonie
péruvienne rencontrer les peuples indigènes. Issu d’une prestigieuse
université américaine, il est, bien évidemment, pétri de culture occidentale, et
ainsi – comme la plupart de nos contemporains - un fervent adepte du sain
rationalisme, considéré comme le mode de connaissance supérieur et
universel. Il ne peut donc pas être soupçonné de complaisance envers les
croyances dites « primitives » et « animistes » ou même « fétichistes » de ceux
qu’il va rencontrer. L’objectif de son travail consiste à démontrer que les
indigènes utilisent rationnellement les ressources de la forêt,
contrairement à ce qu’affirme le gouvernement péruvien, pour justifier le fait
d’envoyer des colons sur leurs territoires. Jeremy Narby effectue là un
excellent travail de relevé des modes de culture, chasse, cueillette et récolte
de plantes des indigènes.
Une troublante
expérience
Mais, suite à l’absorption d’ayahuasca
(boisson dite « hallucinogène » utilisée par les chamanes pour
communiquer avec les « esprits »), ne voilà-t-il pas qu’il connaît une
traumatisante expérience de visions « psychédéliques ».
à cette occasion, il voit, entre
autres « choses », des serpents
lumineux fluorescents, tels qu’il n’en a jamais vu dans sa vie ou dans
ses rêves, et qui, en principe, ne proviennent donc pas de son inconscient.
Chose étrange, la plupart des gens
qui ont des visions avec l’Ayahuasca voient les mêmes choses.
Mais que signifie le serpent ?
Le serpent est, pour beaucoup,
pensé comme étant le symbole de tout mal.
Pourtant, il est clair que le
serpent, même s’il signifie aussi cela, ne signifie pas toujours le mal.
Celui qui est un peu cultivé sait
que le Serpent, lorsqu’il se mord la queue, peut aussi signifier quelque Chose
de tout à fait différent et même contraire, comme, par exemple, la Notion
de l'Infini.
Le Serpent, lorsqu’il se met en
cercle, est donc en relation avec l'Infini, avec ce qui se trouve entre le
Commencement et la Fin.
Ceci est donc aussi
la signification du Serpent.
L’Ayahuasca
L'ayahuasca
[« liane de l'âme » ou encore « vigne de la petite mort »] est le
nom quechua[1]
donné au mélange, utilisé depuis près de 5000 ans par les peuples amazoniens, de
deux plantes: la Banisteriopsis caapi - appelée communément ayahuasca
- une liane des forêts de l'Ouest du bassin amazonien, connue sous plusieurs
autres dénominations locales (caapi, dapa, mihi, kahi, natema, pindé, yajé), et
un additif, en général la Psychotria viridis (chacruna en espagnol) ou la
Diplopterys cabrerana.
Plante Ayahuasca
(Banisteriopsis
Caapi)
Pendant la
préparation de l’Ayahuasca les chamanes chantent :
« L'esprit de la forêt
a révélé dans la vision des lianes de l'esprit,
donnez-nous la connaissance de ce royaume,
le mouvement imperceptible du boa,
le regard pénétrant du faucon et de hibou
l'oreille aiguë du cerf
la force brute du tapir,
la grâce et la puissance du jaguar
Esprit de la famille des feuilles parfumées,
nous sommes toujours ici encore passionnés
pour connaître vos secrets. »
donnez-nous la connaissance de ce royaume,
le mouvement imperceptible du boa,
le regard pénétrant du faucon et de hibou
l'oreille aiguë du cerf
la force brute du tapir,
la grâce et la puissance du jaguar
Esprit de la famille des feuilles parfumées,
nous sommes toujours ici encore passionnés
pour connaître vos secrets. »
Pourtant,
l'ingestion du mélange, macéré et éventuellement bouilli, commence par provoquer
des nausées et des vomissements – ce qui
montre que l’âme se sent alors très mal dans le corps, ce qui l’incite à en
sortir - puis « libère l'âme du corps », permettant au sujet de
découvrir, au travers d'intenses visions (considérées par la mentalité
courante – y compris « scientifique » - comme des « hallucinations »),
des plans jusque là insoupçonnés de la Réalité.
En réalité, il n’y
a pas d’« hallucinations », car tout existe réellement
dans la Création du Créateur, même si ce ne sont que des formes fabriquées par
le vouloir ou le penser humains.
Les plus puissants
mélanges provoquent souvent des visions de serpents
et/ou de jaguars. Or, il se trouve que
ces deux animaux sont au cœur de la Mythologie
Inca, puisque le Serpent correspond au plan inférieur, tandis
que le
Jaguar[2]
correspond au plan médian supérieur.
L'Univers Inca
est, en effet, constitué de trois « Pachas », qui sont à la fois un
concept de temps et d'espace :
-
« Hanan Pacha » (le Monde du Dessus,
associé au Condor),
-
« Kay Pacha » (le Monde d'Ici, associé au
Jaguar),
-
« Urin Pacha » (le Monde d'En-dessous,
associé au Serpent).
L'ayahuasca aurait – dit-on - la
particularité de « révéler » les propriétés des plantes (fougères,
cactus, roseaux, tabac, plantes psychotropes) que l'on mélange avec elle.
Les Indiens s'en
serviraient comme d'une espèce de « microscope » pour observer et répertorier
les plantes de la forêt amazonienne.
Les chamanes
amérindiens « Ayahuasqueiros » en parlent clairement avec leurs propres
mots :
« Pour comprendre le Monde, il faut prendre la
Grand-Mère Ayahuasca.
Elle est une plante enseignante, intelligente,
maîtresse.
Elle travaille en moi.
Tout ce que je dis vient de la plante.
C'est elle qui me l'a appris.
Elle permet de voir le corps en transparence et
de localiser le siège de la maladie.
Elle fait venir à moi les plantes qui
conviennent à mon patient. »
Les chamanes
disent :
« L’on ne trouve pas les vertus thérapeutiques
d’une plante, c’est elle (la plante) qui se manifeste à nous. »
Ils disent
encore :
« Les plantes se mettent en travers de notre
chemin, elles nous appellent, elles changent d’attitude si on leur parle. »
à noter, enfin, que les
expériences sous ayahuasca correspondent, en termes neurophysiologiques, à un
état de vigilance plutôt qu’à un classique état hallucinatoire.
Les plantes
parlent-elles ?
En réalité, ce n’est pas l’ayahuasca elle-même
qui révèle les propriétés – et en particulier les propriétés guérissantes
– ou « médicinales » - des plantes, car l’ayahuasca
ne fait que rendre possible ou favoriser le relâchement ou même le
détachement de l’âme à partir du corps, de sorte qu’elle devienne
réceptive à une partie de la réalité que l’opacité du corps
gros-matériel l’empêche ordinairement de percevoir.
Quant à la nature
précise de cette autre « réalité », c’est précisément le sujet de notre propos
et nous en reparlons plus bas.
Les Européens
n’ont, eux, découvert l'ayahuasca qu’en 1851, grâce au botaniste anglais Spruce,
mais ne l'ont chimiquement analysée qu'en 1969.
Pourtant, cela
n’empêche pas que, aujourd’hui, certains individus peu scrupuleux tentent de
s’approprier ce patrimoine des peuples amazoniens avec un incroyable aplomb.
Lorsque l’on songe, en effet, que l’ayahuasca, plante sauvage poussant dans la
forêt amazonienne, utilisée pour réaliser un breuvage sacré dans les
cérémonies religieuses des peuples indigènes de la région, de même qu'à des fins
thérapeutiques, fait l’objet de la convoitise de « déposeurs de brevets »,
imaginons ce qui se passerait si un indigène tentait de faire breveter l'hostie
et le vin qui sont utilisés dans les rites catholiques, pour ensuite en faire
payer l’utilisation aux fidèles, lors de chaque utilisation.
Le système des
droits de propriété intellectuelle dont se réclament les compagnies occidentales
ou américaines pour obtenir un monopole exclusif sur la commercialisation de
« leurs inventions », oublie complètement la contribution de ceux qui, les
premiers, ont découvert les propriétés de ces plantes et les ont développées
sans faire preuve de leur insatiable mercantilisme.
Surtout lorsque
l’on sait que « 74 % des remèdes ou des drogues
d’origine végétale utilisés dans la pharmacopée moderne ont, en premier lieu,
été découverts par les sociétés « traditionnelles ».
à ce jour, moins de 2 % de toutes
les espèces végétales ont subi des tests scientifiques complets en laboratoire.
La grande majorité des 98% restants se trouvent dans les forêts tropicales.
L’Amazonie contient plus de la moitié de toutes les variétés de plantes du
monde. (Cf. « Le Serpent Cosmique » de Jeremy Narby.)
La Médecine des
signatures
La « Médecine
des Signatures » - ou « Médecine par Analogie » - permet de
reconnaître les concordances existantes entre certains organes du corps
ou certaines maladies, et les formes, les couleurs ou les goûts de certaines
plantes.
La Médecine des
Signatures est basée sur un postulat défendu par Robert Turner, botaniste
anglais du XVIIème siècle, et qui stipule que :
« Dieu
a imprimé sur les plantes, les herbes et les fleurs, des hiéroglyphes, en
quelque sorte la
signature même de leurs Vertus. »
Toujours au XVIIème
siècle, en 1624, Oswald Crollius explique, dans son traité « La Royale
Chimie » :
« Les
herbes parlent au médecin curieux par leur
signature, lui découvrant, par quelque ressemblance, leurs
Vertus intérieures, cachées sous le voile du silence de la Nature. »
Par exemple, la
pharmacopée traditionnelle, pour soigner les maladies du
foie, recommande l'anémone hépatique (Hepatica
triloba), dont les feuilles rappellent la
forme du foie.
De même, pour
soigner les affections de la vésicule biliaire,
la chélidoine (Chelidonium majus),
dont le suc jaune rappelle la
bile, serait tout indiquée.
La ficaire (Ficaria
ranunculoides), dont les tubercules valident
l'appellation d'Herbe aux
hémorroïdes, constituerait
une très bonne préparation anti-hémorroïdaire,
etc.
Plusieurs de ces
remèdes ont, depuis, été validés par la pharmacopée moderne.
Sources:
Les plantes des Dieux, par Richard Evans Schultes et Albert Hofman (Paris,
Berger-Levrault, 1981), Le pouvoir des plantes, par Brenda Lehane (Paris,
Hachette, 1977), Les simples entre nature et société, par Pierre
Lieutaghi (EPI, Mane, 1983).
La pratique de l’Ayahuasca
L’Ayahuasca, on
l’appelle aussi la « Télévision de la Forêt ».
« Elle parle,
elle guérit et prend l'apparence d'une Grande Dame.
Le Grand Serpent porte les mémoires de la Vie…
La guérison viendra lorsque la Dame maîtrisera le Serpent ! »
Le Grand Serpent porte les mémoires de la Vie…
La guérison viendra lorsque la Dame maîtrisera le Serpent ! »
Le mot
ayahuasca désigne bien des choses, à
différents niveaux. C'est d'abord, comme déjà vu, en Quechua, le nom
d'une plante: « aya », « la mort », et « huasca », « vigne » ou « liane ».
« Vigne de la petite mort ». C'est aussi le nom d'un breuvage de vision
(chose intéressante, les Shipibos, une des principales ethnies à manipuler l'ayahuasca,
n'ont pas de mot dans leur langue pour traduire «halluciner» ou
«hallucinogène»). Ce breuvage est le produit de la longue cuisson de deux
plantes, l'ayahuasca qui donne le mareacion,
le vertige, le mal de mer, et la chacruna qui donne la
vision (absorbées séparément, ces plantes ne produisent pratiquement
aucun effet).
L’un des effets
les plus spectaculaires de l’ayahuasca est de provoquer, chez la plupart, le
vomissement, d'où son surnom de « purga ». Réputé salutaire, le
vomissement est, en premier lieu, vu comme un nettoyage du corps gros-matériel.
Mais c'est aussi, dans le contexte de la lutte d’influence entre les différents
sorciers, une manière de se débarrasser des influences néfastes et des
ensorcellements. D'une manière générale, l’on peut constater que le
vomissement est directement relié à l'état physique et psychique de la
personne. Relié également au contenu des visions. Et l'ingestion du
breuvage se faisant à jeun, il est surprenant de constater qu'on vomit souvent
bien plus que ce qu'on a pu ingurgiter...
« Ayahuasca »
est aussi le mot employé pour désigner une pratique, ou même un ensemble
de pratiques complexes, hautement codifiées, pratiques d'apprentissage, de
divination et de guérison, au cœur desquelles on retrouve le concept
de « dieta », la diète. Les préceptes de la dieta
varient quelque peu d'un « curandero » (soigneur) à un autre.
Mais, pour l'essentiel, cela consiste en un régime alimentaire sobre fait de
riz, plantain, manioc et poisson, sans sucre, ni sel ou autres condiments ; il
faut aussi pratiquer l’abstinence sexuelle, ne pas avoir de contacts avec
l’autre sexe, ou avec tout individu n'observant pas la dieta au même
moment ; il faut, enfin, avaler une « plante-maîtresse».
L'objet de la
dieta est justement de recevoir les enseignements d'une plante-maîtresse,
de même que la protection de la dite plante, et d'apprendre les icaros
(chants psalmodiés par les chamanes lors de la cérémonie de l’ayahuasca) qui
vont avec. L’on reçoit ces enseignements en rêve ou au cours d'une
vision, rarement du maestro. Les périodes de dieta varient de deux
semaines à ... six ans.
Les curanderos
sont parfois appelés vegetalistas, en ce sens qu'ils utilisent les
plantes non seulement pour en fabriquer des médicaments, mais aussi pour
acquérir un savoir. Mis à part l'ayahuasca,
l’on a donc une véritable «université» où chacune des plantes-maîtresses
dispense un enseignement particulier. Même si la plupart de ces plantes
provoquent des effets physiques et psychiques notables, la
majorité ne sont pas à proprement parler « hallucinogènes ».
Enfin, pour
beaucoup, l'Ayahuasca
est un esprit,
un guide,
un professeur,
une entité.
Il est difficile
de traduire en mots ce qu'on ressent durant une séance d'ayahuasca,
de « comprendre » ou de « savoir » ce qui se passe. Lorsque les scientifiques
identifièrent l'alcaloïde qu'ils croyaient responsable des visions, ils
l'appelèrent « télépathine ». Il s'agit, en fait, d'une sensation non équivoque
de participation à la réalité. Quelque chose comme une absence de doute face
au senti : le senti est la réalité. En
comparaison, notre « monde normal » se caractérise par une impression
d'exclusion, dans laquelle le senti et la réalité sont perçus comme deux
choses distinctes (dualisme).
L’on pourrait dire
que cette école - car cela en est une - est pour les autodidactes. Mais,
en fait, le mot « autodidacte » traduit mal l'expérience, car, selon les
curanderos, le professeur, c'est avant tout la
plante elle-même.
La science
va-t-elle re-découvrir les êtres de
la Nature ?
Avoir
une plante comme professeur, surtout lorsque
la plante elle-même parle, voilà qui
n’est pas banal ! Les plantes auraient-elles une
âme ?
En ce cas, de quoi serait
faite cette âme ?
Les Indiens qui racontent cela, du
fait des effets de l’ayahuasca sur leur psychisme, ne serait-il pas en train de
complètement délirer ?
Mais alors, d’où vient leur
incroyable connaissance des plantes ?
Après son expérience avec l’ayahuasca,
Jeremy Narby observe, en effet, que les Indiens d’Amazonie maîtrisent
l’utilisation des plantes d’une manière incroyablement précise.
Et cela l’interpelle fortement, car
voilà des primitifs ignorants qui, à ce sujet, en savent bien plus que
lui, l’universitaire occidental !
Comment cela est-il
possible ?
L’exemple de
l’étonnant curare
L’exemple du curare est très
frappant. Il y a plusieurs millénaires, les chasseurs amazoniens avaient
développé ce paralysant musculaire pour répondre à un besoin précis : il
leur fallait une substance qui tue sans empoisonner la viande et fasse lâcher
prise aux animaux vivant dans les arbres. Par exemple, bon nombre de singes
atteints par une flèche non traitée, avant de s’affaisser, enroulent leur queue
autour d’une branche et meurent hors de portée de l’archer.
Le curare constitue
aujourd’hui un très important adjuvant de la chirurgie tout à fait moderne et
scientifique. Dans les années 1940, les scientifiques se sont, en effet, rendu
compte que ce « poison de sarbacane » pouvait grandement faciliter les
opérations de l’abdomen et des organes vitaux : le curare interrompt la
transmission des impulsions nerveuses, provoquant la relaxation complète de tous
les muscles, y compris ceux de la respiration. Les chimistes ont alors
synthétisé des dérivés de la mixture végétale en modifiant légèrement la
structure moléculaire de l’un de ses ingrédients actifs. Actuellement, les
anesthésistes qui "curarisent" leurs patients emploient exclusivement des
produits synthétiques.
Comme déjà vu, d’après Jeremy Narby,
« 74% des remèdes ou des drogues d’origine végétale utilisées dans la
pharmacopée moderne ont été découverts en premier lieu par les sociétés
“traditionnelles” ». La plupart du temps, les scientifiques rechignent à
reconnaître que des Indiens « vivant à l’âge de la pierre » aient pu développer
quoi que ce soit : ils affirment que c’est par hasard que ces cultures
« primitives » seraient tombées sur des molécules toutes faites par la Nature.
Le « dieu hasard » est décidément
très fort !
Pourtant, dans le cas de ce
paralysant musculaire, cet argument paraît peu probable. D’une part, il existe à
travers l’immensité du bassin amazonien une quarantaine de genres de
curare élaborés à partir de quelque soixante-dix espèces végétales
différentes. D’autre part, lorsqu’on examine les techniques de sa préparation,
il devient évident qu’il n’y a pas beaucoup de place pour le hasard. Par
exemple, pour fabriquer le genre de curare utilisé par la médecine occidentale,
il est nécessaire de combiner plusieurs plantes et de les cuire dans l’eau
pendant soixante-douze heures, tout en évitant de respirer les vapeurs
parfumées, mais mortelles, que la mixture dégage. De plus, le produit
final, qui se présente sous la forme d’une pâte concentrée, n’est actif que par
voie sous-cutanée. Si on l’avale ou si on l’étale sur sa peau, par exemple, il
est anodin.
Comment des chasseurs de la forêt
tropicale, soucieux de préserver, avant tout, la qualité de la viande, ont-ils
pu imaginer une solution intra-veineuse ? Lorsque l’on questionne ces peuples
sur l’invention de cette substance, ils répondent quasi invariablement que son
origine est céleste, de sorte qu’elle est devenue mythique. Ainsi, les
Tukanos de l’Amazonie colombienne disent que c’est
le Créateur de l’Univers Lui-même qui a inventé le curare, et qui le leur
a donné. Invariablement, les Indiens
affirment que ce sont les plantes elle-mêmes qui leur indiquent où
prendre ce dont ils ont besoin et comment le préparer.
Visions chamaniques
Sornettes
et sottes croyances que tout cela... Le
chercheur Jeremy Narby met ces questions au placard et, en bon rationaliste,
rend alors ses travaux sans mentionner ses constatations. Ce n’est que
près de sept ans plus tard, après le « Sommet de la Terre » de Rio de Janeiro en
1992, que le déclic viendra pour lui :
« C’est à Rio que je
me suis rendu compte de la profondeur du dilemme posé par le savoir
hallucinatoire indigène. D’un côté, ses résultats sont confirmés
empiriquement et sont utilisés par l’industrie pharmaceutique. De l’autre, son
origine ne peut même pas être discutée scientifiquement, puisqu’elle
contredit les axiomes de la connaissance occidentale. »
Au-delà de l’interrogation
strictement logique et intellectuelle, Jeremy Narby a probablement été motivé
par son amitié pour les Ashaninca ou d’autres peuples autochtones qu’il a
alors côtoyés. Par exemple, dans son livre, il narre ses fréquentes
conversations avec Carlos, un chamane, qui était très certainement aussi
son ami. Jeremy Narby se voit obligé d’admettre que les êtres humains indigènes
qu’il rencontre ne sont pas tous des imbéciles. Pourtant
ils affirment, de très logique et
naturelle manière, qu’ils conversent avec les
« esprits »
des plantes et de la Nature...
(En fait – voir
plus loin -, les plantes ont – si l’on veut - une
« âme » mais pas réellement d’« esprit ».
Les « âmes » des plantes sont, en fait, des
« entités » du genre « entéallique »,
donc des « entéaux ».)
Le chercheur Jeremy Narby décide
alors de résoudre ce paradoxe : comment la découverte en grandes quantités de
molécules peut-elle être expliquée par des principes qui contredisent les
fondements mêmes de la science ? Il se consacre alors à une lecture systématique
des données ethnologiques disponibles sur les expériences chamaniques à
travers toute la planète. Au terme de plusieurs mois de cogitations acharnées,
les pièces du puzzle s’emboîtent enfin : Tous les
témoignages chamaniques décrivent le principe essentiel de la vie comme
un double serpent enroulé,
une échelle de corde ou
un escalier tournant.
Jeremy Narby finit par faire le
rapprochement avec ... la description scientifique de l’ADN,
principe commun à toute forme de vie selon notre science. En observant des
peintures figuratives des « visions » chamaniques, il reconnaît (des
photographies dans son livre en témoignent) certains composants de la vie
cellulaire décrits par la biologie moléculaire actuelle (tels les
ribosomes) ainsi que la représentation de phases de division de l’ADN et sa
duplication.
L’A.D.N.
Qu’est-ce que l’ADN ?
L'ADN,
ou Acide Désoxyribo-Nucléique,
est présent dans tout organisme vivant. Il contient, sous forme de
chromosomes et de gènes, l'ensemble des caractères héréditaires,
et permet donc aux cellules de chaque organisme vivant de se reproduire, de se
structurer et de fonctionner. La structure moléculaire de l'ADN
a la forme caractéristique d'une échelle en spirale.
Bien sûr, face à cela, l’on peut
préférer croire que Jeremy Narby est un « illuminé farfelu ». S’en tenir à ce
jugement permet de tranquillement continuer à railler les stupides croyances
obscurantistes des sociétés « primitives » et de perpétuer le « développement »
d’un monde technocratique, en apparence « très rationnel », mais à l’origine de
tout aussi rationnels destructions massives et saccages planétaires...
Mais l’on peut aussi agréer ce que
dit le livre au sujet des étonnantes conjonctions existant entre deux modes
de savoir fondamentalement aux antipodes l’un de l’autre, de sorte que
s’impose la maxime :
« Tout compte fait, la Sagesse
exige non seulement l’investigation de nombreuses choses, mais aussi la
contemplation du Mystère. »
« Le Serpent
cosmique - l’ADN et les origines du savoir », de Jeremy Narby, dans la
collection « Terra Magna », chez Georg
éditeur S.A. (Adresse : 46,
Chemin de la Mousse CH 1225 Genève), publié en 1995.
Le Serpent cosmique
Texte paru dans
Le Temps stratégique No 73, de Décembre 1996.
Extrait du site :
http://www.archipress.org/narby/serpent.htm
Se pourrait-il que, au cours de
leurs visions, les chamanes d’Amazonie entendent parler les plantes et voient
la double hélice (le
double serpent) de l’ADN, cette molécule
de base, commune à tous les êtres vivants, et accèdent ainsi aux plus intimes
secrets de la Nature ?
Il existe une relation entre
les serpents entrelacés que perçoivent les
chamanes amazoniens dans leurs visions, et la double
hélice de l’ADN aujourd’hui familière aux biologistes moléculaires.
Jeremy Narby raconte
son histoire :
(Les commentaires
sont de l’auteur du présent article)
« Les choses avaient
commencé onze ans plus tôt. Je venais d’arriver à Quirishari, dans la
vallée du Pichis, en Amazonie péruvienne, dans l’intention d’étudier la
manière dont les Indiens Ashaninca utilisent leurs ressources naturelles,
une recherche de terrain qui devait durer deux ans et me conduire à un doctorat
en anthropologie de l’Université de Stanford.
Pour me familiariser
avec la vie des habitants du village, je me mis à les accompagner dans leurs
activités, en forêt notamment. Au cours de ces balades sylvestres, je leur
posais souvent des questions sur les plantes que nous rencontrions. Je me rendis
compte très tôt qu’ils
maîtrisaient un savoir botanique littéralement encyclopédique.
Ils savaient tout des plantes qui accélèrent la
cicatrisation, guérissent la diarrhée, soignent le mal de dos, neutralisent le
venin de tel ou tel serpent. Chaque fois que l’occasion s’en présentait,
j’essayais moi-même ces remèdes, vérifiant empiriquement que ce que mes
consultants indigènes disaient était exact. Inévitablement, j’en vins à leur
demander comment ils avaient appris ce qu’ils savaient.
Ils me répondirent,
d’une manière qui me parut fort énigmatique, que
leur savoir leur venait
des plantes elles-mêmes,
que les chamanes, après avoir bu une
mixture hallucinogène, parlaient, au sein de
leurs visions, avec les
essences animées
ou « esprits »
des plantes, qui sont les mêmes pour tous les
êtres vivants, et en obtenaient de l’information. »
Nous avons donc ici, très
clairement décrit, le processus permettant à des êtres humains devenus
incapables de voir avec d’autres yeux que les yeux gros-matériels et d’entendre
avec d’autres oreilles que les oreilles gros-matérielles, de voir avec leurs
yeux gros-matériels fins et d’entendre avec leurs oreilles gros-matérielles
fines.
Il faut juste bien comprendre ce
qu’il en est des « esprits » des plantes, car
une plante n’est pas un être humain !
« Ils ajoutaient que
la Nature est intelligente et parle un langage visuel,
non seulement au travers d’hallucinations et de rêves, mais aussi
de signes concrets quotidiens.
C’est ainsi, par
exemple, disaient-ils, que la plante qui à la base de
ses feuilles possède deux crochets blancs similaires à ceux du serpent « fer-de-lance »,
guérit de la morsure de ce dernier.
« Regarde la forme », me
disaient-ils, « c’est le signe que
la Nature nous donne ». Comme si une même « intelligence » animait
le buisson et le reptile. »
La Loi Universelle d’Attraction du
Genre Semblable est, bien sûr, ici au travail !
« Il va sans dire que
je me refusais à prendre leurs déclarations au pied de la lettre. J’avais une
formation universitaire et m’estimais capable de distinguer ce qui est réel de
ce qui ne l’est pas. Ces Indiens des forêts pouvaient me dire tout ce qu’ils
voulaient, ils ne réussiraient pas à me convaincre qu’ils avaient appris la
botanique en dialoguant, au cours de leurs hallucinations, avec je ne sais
quelle intelligence cachée dans la nature. D’ailleurs, il ne pouvait y avoir
aucune information vérifiable dans les hallucinations : après tout, confondre
hallucinations et réalité s’appelle psychose... »
Les habituels préjugés {du dominé}
de l’intellect sont ici bien mis en évidence…
« En outre, mes
recherches de doctorat sur l’utilisation que les Ashaninca font de leurs
ressources naturelles n’étaient pas neutres.
à cette époque en effet, c’était
au début des années 1980, de grands organismes internationaux comme la Banque
Mondiale rêvaient de "développer" l’Amazonie péruvienne à coups de centaines de
millions de dollars. A cette fin, ils tentaient d’obtenir que les territoires
des collectivités indigènes de la région soient juridiquement attribués à des
colons individuels, venant de la partie non-amazonienne du pays, animés d’une
mentalité de "marché", dans l’espoir qu’ils se mettraient alors à "développer la
jungle", c’est-à-dire à la déboiser pour la transformer en pâturages pour le
bétail. Une expropriation justifiée, affirmaient-ils, puisque les Indiens sont
incapables d’utiliser rationnellement leurs ressources naturelles. Je voulais, à
travers mes recherches, démontrer le contraire et avais donc le sentiment qu’en
mettant en exergue l’origine prétendument hallucinatoire du savoir écologique
des Ashaninca, j’affaiblirais mon argument.
Un soir, pourtant,
après quatre mois de terrain, alors que je discutais avec quelques Indiens
devant la maison en buvant de la bière de manioc, que je faisais l’éloge de leur
savoir botanique et leur posais une fois de plus la question : « Mais comment
avez-vous appris tout cela ? », Ruperto me répondit :
- « Vous savez, frère
Jeremy, si vous voulez vraiment le comprendre, vous devez boire de l’ayahuasca »
- une mixture hallucinogène, qu’il compara à une
« télévision de la forêt »,
ajoutant :
- « Si vous voulez,
je peux vous montrer ça, à l’occasion ».
La curiosité me
poussa à accepter, d’autant plus volontiers d’ailleurs que Ruperto avait suivi
une formation complète d’ayahuasquero et semblait connaître son sujet.
Une nuit, plusieurs
semaines plus tard, nous nous sommes donc retrouvés pour boire à quelques-uns de
l’ayahuasca, assis sur la plate-forme d’une maison tranquille.
L’expérience qui s’ensuivit ébranla ma vision de la réalité. »
Peinture de Pablo Amaringo
« J’avalai le liquide
amer, et, presque aussitôt, fus pris de nausées. Ruperto se mit alors à
chanter des mélodies d’une saisissante beauté
[Il s’agit des
fameux « icaros »]. Des images commencèrent à inonder ma tête. Je
me retrouvai entouré d’énormes serpents,
aux couleurs vives et fluorescentes. J’étais terrifié.
Les serpents,
qui paraissaient plus vrais que nature, m’expliquèrent sans mots que je n’étais
qu’un être humain. Je me rendis compte qu’ils disaient profondément vrai,
et que ma compréhension habituelle et rationnelle de la réalité avait des
limites - à preuve l’incapacité dans laquelle je me trouvais de saisir ce que
mes yeux étaient en train de voir. Je m’étais toujours considéré capable de tout
comprendre, mais, là, tout à coup, l’arrogance de cette prétention me submergea.
Puis, je me mis à vomir des couleurs et quittai mon corps pour voler au-dessus
de la Terre. Je vis également des images défiler à une vitesse ahurissante, par
exemple les nervures d’une main humaine alternant avec les nervures d’une
feuille végétale. Les visions défilaient sans relâche, je ne pouvais les
retenir toutes. Peu après minuit, elles s’estompèrent, et je m’endormis.
Le lendemain, j’eus,
pour la première fois de ma vie, le sentiment d’appartenir intégralement à la
Nature. J’allai me promener au bord de la rivière. La végétation scintillait au
Soleil. Je regardai les veines de ma main et vis qu’elles étaient aussi belles
que celles d’une feuille.
L’expérience était
troublante, parce qu’elle confirmait les dires des Ashaninca, à savoir
qu’il est possible d’apprendre des choses dans la sphère hallucinatoire des
ayahuasqueros. Et puis, qui étaient ces serpents
qui semblaient si bien connaître les êtres humains ?
J’étais jeune alors
et craignis que mes collègues ne me prennent point au sérieux. Je renonçai donc
à creuser la question et évitai soigneusement de la mentionner dans mes
recherches. Fin 1986, je regagnai la Suisse pour rédiger ma thèse ; deux ans
plus tard, j’obtenais le titre de docteur en anthropologie.
En 1989, je commençai
à travailler pour Nouvelle Planète, une organisation non-gouvernementale
qui s’efforce d’aider les populations locales sur le terrain. Je me mis à
sillonner le bassin amazonien afin d’enregistrer les projets d’organisations
indigènes anxieuses de démarquer et de titulariser leurs territoires, et à
parcourir l’Europe afin de récolter des fonds pour les y aider. Ce travail
m’occupa à plein pendant quatre années. J’étais heureux que ma formation
d’anthropologue puisse être utile à ceux qui m’avaient servi de sujets d’étude.
Je donnais des conférences pour expliquer qu’il est écologiquement sensé de
démarquer les territoires des peuples indigènes de la forêt amazonienne, et que
leurs techniques agricoles, fondées sur la polyculture et le déboisement de
petites surfaces, sont parfaitement rationnelles.
Mais plus je
discourais, et plus j’étais conscient de taire certaines choses, en particulier
que les Indiens affirment tenir leur
savoir botanique d’hallucinations provoquées par l’ingestion d’une décoction de
plantes.
En Juin 1992,
j’assistai au Sommet de la Terre de Rio. Les gouvernements participant à
cette méga-conférence sur le développement et l’environnement manifestèrent
formellement leur intention de prendre en considération les peuples indigènes et
leurs connaissances spécifiques. Subitement, tout le monde s’était en effet mis
à parler du savoir écologique des peuples indigènes - sans que personne
d’ailleurs ne mentionne jamais l’origine éventuellement hallucinatoire de
ce savoir. Je me sentis donc le devoir de reprendre cette question qui, me
dis-je, ne manquerait pas de surgir si, un jour, le dialogue avec les peuples
indigènes se nouait vraiment. Et puis j’avais, je l’avoue, une autre motivation,
personnelle : je voulais éclaircir la question de l’identité des serpents
aperçus dans mes hallucinations, à Quirishari, sept ans plus tôt.
Je me lançai
sur la piste du
serpent, de manière tout à
fait délibérée, cette fois-ci.
Douze mois après la
conférence de Rio, je décidai même de mener une enquête suffisamment approfondie
sur l’énigme du savoir hallucinatoire amazonien pour en tirer la matière d’un
livre, que j’intitulai provisoirement « Hallucinations écologiques ». Le
directeur de l’organisation qui m’emploie me donna son accord, ajoutant même :
- « Prends ton
temps. »
J’étais prêt à
entamer mes recherches.
Mais par où
devais-je commencer ?
Ma réaction
instinctive eût été de retourner en Amazonie péruvienne, pour y vivre, quelque
temps encore, avec des ayahuasqueros. Mais ma vie avait changé. Je
n’étais plus un jeune anthropologue sans attache, mais un père de famille avec
deux enfants en bas âge. Mon enquête allait donc devoir se centrer autour de mon
bureau villageois en Suisse et de la bibliothèque universitaire la plus proche.
Je commençai par me
plonger dans la littérature anthropologique sur le chamanisme. Je lus
pendant des mois et pris des centaines de pages de notes catégorisées. Ce
travail me fit apparaître qu’à travers l’immensité de l’Amazonie occidentale,
des dizaines de peuples indigènes
utilisent l’ayahuasca et affirment qu’il est la source de leur savoir
botanique. Les anthropologues ont souvent signalé leurs propos, mais n’y
ont jamais vu cependant que des métaphores, tant ils étaient convaincus que les
Indiens ne pouvaient avoir acquis leur savoir botanique que par expérimentation
aléatoire.
Or, il suffit de
considérer les recettes de certaines mixtures indigènes, le curare par
exemple, pour se rendre compte que pareille explication est insuffisante. L’on
sait que ce poison, d’origine amazonienne, a révolutionné la médecine moderne,
du jour où, dans les années 1940, les scientifiques ont découvert qu’il paralyse
tous les muscles, y compris ceux de la respiration, et facilite donc grandement
la chirurgie des organes vitaux. Il existe dans le bassin amazonien quarante
sortes de curare, élaborés à partir de quelque soixante-dix espèces végétales
différentes. Pour fabriquer le curare qu’utilise la médecine moderne, il faut
combiner plusieurs plantes et les cuire dans de l’eau pendant soixante-douze
heures, en évitant de respirer les vapeurs parfumées mais mortelles qu’elles
dégagent. Le produit de cette cuisson est une pâte concentrée, active seulement
par voie sous-cutanée : si on l’avale ou si on l’étale sur la peau, ses effets
sont anodins. Il est difficile de comprendre comment quelqu’un aurait pu tomber
sur une recette aussi compliquée en expérimentant au hasard - surtout si l’on
considère qu’il
existe dans la forêt amazonienne au moins 80.000 espèces différentes de plantes.
Après avoir examiné
de façon relativement détaillée les données ethnographiques, botaniques et
neurologiques, j’en vins à considérer la possibilité que les chamans amazoniens
accèdent réellement à de l’information dans leurs hallucinations. S’il en était
ainsi, me dis-je, l’énigme du savoir
hallucinatoire se réduit à une seule question : l’information qu’ils acquièrent
vient-elle de l’intérieur du cerveau (comme la science le dit des
hallucinations) ou vient-elle du monde extérieur, du monde des
plantes (comme ils le disent eux-mêmes) ?
De l’intérieur
ou de l’extérieur ? Telle était la question.
Le premier jour de
Printemps où il fit Soleil, je pris congé et partis me promener dans une réserve
naturelle. En marchant, je réfléchissais à cette question devenue
obsessionnelle : De l’intérieur ou de l’extérieur ?
Tout à coup, il me vint à l’esprit que les deux possibilités étaient
peut-être vraies en même temps ; que l’information pouvait venir à la fois de
l’intérieur de la tête et du monde extérieur des plantes. Je ne voyais pas
encore ce que cette idée pouvait bien signifier, mais elle me plaisait, car elle
conciliait deux points de vue apparemment divergents.
Le lendemain, de
retour dans mon bureau, je me mis à parcourir mes notes de lecture. Je venais de
lire sans discontinuer pendant six mois, et il ne me restait plus qu’à classer
mes notes pour pouvoir commencer à écrire mon livre. Avant de m’atteler à ce
travail systématique, je décidai cependant de consacrer une journée entière à
feuilleter librement les piles de papier que j’avais amassées au cours de
l’Automne et de l’Hiver.
J’examinai mes notes
sur les expériences personnelles que certains anthropologues ont faites avec de
l’ayahuasca, et relus, pour le plaisir, le texte complet du premier
compte-rendu du genre, celui de Michael Harner.
Harner raconte
l’expérience qu’il a vécue, en 1961, chez les Indiens Conibo de
l’Amazonie péruvienne. Lorsqu’il eut ingéré de l’ayahuasca,
des créatures reptiliennes géantes surgirent dans son
cerveau et lui montrèrent comment elles avaient créé la vie sur Terre,
insistant sur le fait qu’une telle information était réservée aux mourants et
aux morts. Harner vit alors des espèces de dragons arriver du cosmos et
créer la vie en se cachant sous des formes multiples. « J’appris », écrit-il,
« que les créatures-dragons résidaient à l’intérieur de
toutes les formes de vie, homme y compris ». Par un astérisque, Harner
renvoie alors le lecteur à une note au bas de la page (qui, étrangement,
n’apparaît pas dans la traduction française originale, mais a été intégrée dans
le texte publié dans ce numéro du « Temps stratégique »), qui affirme
ceci : « Je dirais, en rétrospective, que [les
créatures] étaient presque comme de l’ADN. Mais en ce temps-là, en 1961,
je ne savais rien de l’ADN. ».
Je marquai une pause.
Il y a effectivement de l’ADN à l’intérieur du cerveau humain, ainsi que dans le
monde extérieur des plantes, puisque la molécule de la
vie qui contient l’information génétique est la même pour toutes les espèces.
L’ADN peut donc être considéré comme une source d’information à la fois
externe et interne - précisément ce que je cherchais à imaginer la
veille, en déambulant dans la forêt.
Brin d’ADN
Harner ne fait aucune
autre mention de l’ADN dans son texte. En revanche, quelques pages plus loin, il
note que "dragon" et "serpent" sont synonymes, ce qui me fit
penser que la double hélice ressemblait, par sa forme, à deux serpents
entrelacés.
C’est ainsi que je
suis tombé sur l’idée qu’il existe un lien entre l’ADN
et le savoir hallucinatoire.
Au début, je ne
prenais pas vraiment cette idée au sérieux. Après tout, il semblait hautement
improbable que des Indiens consommateurs de drogue et vivant dans des forêts
profondes aient pu communiquer dans leurs hallucinations avec l’ADN. Mais aucune
autre explication concernant le savoir chamanique ne me paraissait
satisfaisante. Si les ayahuasqueros accédaient réellement à de
l’information botanique, d’où provenait-elle ? L’hypothèse de l’ADN
présentait au moins l’avantage de répondre à la question.
Les jours suivants,
je classai l’ensemble de mes notes et repérai plusieurs autres cas où
des serpents cosmiques sont associés à la création de
la vie. Mais je n’étais pas plus avancé pour autant.
à l’époque où je séjournais à
Quirishari, je savais déjà que la croyance animiste
selon laquelle tous les êtres vivants sont,
précisément, animés par les mêmes essences avait été corroborée en 1953
par la découverte de la structure de l’ADN. J’avais appris au collège, en
classe de biologie, que la molécule
de la vie est la même pour toutes les espèces et
que l’information génétique nécessaire à l’élaboration d’une rose, d’une
bactérie ou d’un être humain est codée dans un langage universel à quatre
lettres, A, C, G et T, qui désignent quatre composés chimiques formant la double
hélice de l’ADN. La correspondance entre l’ADN et les essences animées
perçues par les chamans n’était pas donc pas nouvelle pour moi. Le classement de
mes notes ne me révéla aucune autre correspondance intéressante.
Avant de commencer à
rédiger mon livre, je tins néanmoins à vérifier en bibliothèque une dernière
piste. Dans plusieurs mythes de création où j’avais trouvé des
serpents cosmiques, j’avais également trouvé
des jumeaux - peut-être était-ce là une
correspondance avec la double hélice. Je fouillai quelques livres sur la
mythologie et découvris avec surprise que le thème des jumeaux était très
répandu dans les mythes de création, non seulement en Amérique du Sud, mais dans
le monde entier. Ainsi, le serpent à plumes des Aztèques, Quetzalcóatl,
qui symbolise l’énergie vitale sacrée, est-il un enfant
jumeau du serpent cosmique Coatlicue - en aztèque, le mot coatl
ayant le double sens de "serpent" et de "jumeau".
Comment se faisait-il
que les Aztèques parlaient également d’un serpent double, d’origine
cosmique, et symbole de l’énergie
vitale ? »
Notons ici que ce double serpent
est en relation avec la « Koundalinî », c’est-à-dire la force sexuelle du
corps, laquelle est ce que la matière grossière peut produire de plus fin et de
plus rayonnant.
La force sexuelle, se manifestant
de façon doublement hélicoïdale et montant et descendant depuis la base
de la colonne vertébrale jusque au-dessus de la tête et inversement est destinée
à faire la liaison entre la matière et l’esprit, l’esprit et la matière. C’est
« La Force du Serpent ».
« Je quittai la
bibliothèque et rentrai à la maison. J’avais besoin de réfléchir. Que signifiait
donc tout cela ? Je partis à nouveau me promener en forêt, afin de mettre de
l’ordre dans mes idées. Après avoir récapitulé les éléments que j’avais en main,
je me rendis compte que j’étais dans une impasse. Ruminant sur ce blocage, je
songeai tout à coup au conseil que m’avaient prodigué les Ashaninca :
« Regarde la
forme », m’avaient-ils dit. Le
matin même, à la bibliothèque, j’avais consulté plusieurs encyclopédies à propos
de l’ADN, et noté que sa forme y était le plus souvent décrite comme une
échelle, ou une échelle de corde torsadée, ou un escalier en
colimaçon. Le déclic eut lieu dans le quart de seconde suivante : « LES
ÉCHELLES ! Les échelles des chamanes « symboles de la profession » (selon
Métraux), présentes dans les thèmes chamaniques du monde entier (selon
Eliade) ! »
« Je revins
précipitamment à mon bureau et entrepris de parcourir rapidement les livres de
Mircea Eliade, en particulier « Le chamanisme et les techniques archaïques de
l’extase » (1951). Selon Eliade, il existe « d’innombrables exemples »
d’échelles chamaniques sur les cinq continents : ici des « échelles
tournantes », là des « escaliers » ou des « cordes tressées », impliquant
nécessairement une communication entre le Ciel et la Terre. Eliade cite
également l’Ancien Testament, où l’on voit Jacob rêver une
échelle dont le sommet atteint le Ciel, par laquelle « les Anges du
Seigneur montent et descendent ».
« Eliade mentionne
aussi des serpents cosmiques, en Australie cette fois.
Les correspondances
que je commençais à percevoir dépassaient de loin la portée de mon enquête. Mais
je ne pouvais plus m’arrêter. Je saisis les quatre tomes de l’œuvre de Joseph
Campbell consacrée à la mythologie mondiale pour voir s’il mentionnait d’autres
serpents cosmiques. L’un des premiers dessins que j’aperçus en ouvrant le
volume intitulé Mythologie occidentale était un sceau mésopotamien datant de
2200 av. J.-C. environ, montrant le Dieu Serpent sous forme humaine avec son
symbole caducée : deux serpents entrelacés en une double hélice.
Feuilletant
fiévreusement le livre de Campbell, je trouvai des serpents torsadés dans
la plupart des images représentant une scène sacrée. Grâce à l’index je
découvris qu’il y a des serpents cosmiques créateurs de vie non seulement en
Amazonie, au Mexique et en Australie - mais à Sumer, en
égypte, en Perse, dans le
Pacifique, chez les Hindous, en Crète, en Grèce et en Scandinavie. Campbell
écrit à propos de ce symbolisme omniprésent : « Partout
où la Nature est vénérée comme étant animée en elle-même, et donc divine de
façon inhérente, le Serpent est révéré comme son symbole ».
« Je consultai
aussitôt le Dictionnaire des Symboles, à la rubrique "Serpent" et
lus :
« Il joue des sexes
comme de tous les contraires ; il est femelle et mâle aussi,
jumeau en lui-même, comme tant de grands
Dieux créateurs qui sont toujours, dans leur représentation première, des
serpents cosmiques. [...] Le serpent visible n’apparaît donc que comme une
brève incarnation d’un Grand Serpent Invisible, causal et a-temporel, maître du
principe vital et de toutes les Forces de la Nature.
C’est un vieux Dieu premier que nous retrouverons au départ de toutes les
cosmogénèses, avant que les Religions de l’Esprit
ne le détrônent. »
« Face à l’énormité
de ce que je croyais être en train de découvrir, ma tête se mit à tourner. Il
apparaissait, en effet, que, partout dans le monde, les chamanes utilisent
certaines techniques pour réduire leur conscience au niveau moléculaire et
accéder ainsi à la connaissance du Serpent/Principe Vital, alias
ADN. Depuis des mois, les indices de cette
découverte se trouvaient à portée de ma main, dans ma propre bibliothèque, mais
je n’avais pas su les voir. D’ailleurs, personne ne semblait les avoir
remarqués. Ni Eliade, ni Campbell ne mentionnent l’ADN. Est-ce parce que le
savoir occidental sépare les choses pour les comprendre : d’un côté la
mythologie, de l’autre la biologie, et laisse entre deux s’étendre un
no man’s land ? »
En fait, l’ADN
nous apparaît lui-même comme une expression de la Force
sexuelle dans la cellule…
« Il était plus de 20
heures. Je n’avais rien mangé. Je sortis une bière du frigo et posai un disque
de violon sur la platine. Puis, je me mis à arpenter le bureau en réfléchissant
à haute voix. Au bout de quelques minutes, je me rendis compte que je pourrais
peut-être tester mon hypothèse selon laquelle les chamanes voient de
l’information moléculaire, en examinant les peintures de Pablo Amaringo, un
ayahuasquero péruvien doué d’une mémoire photographique, qui peint ses
hallucinations de façon hyperréaliste. »
"Pregnant by an Anaconda", peinture de Pablo Amaringo (détail)
« Ces toiles sont
reproduites dans un beau livre intitulé, en traduction littérale, « Visions
d’Ayahuasca : l’iconographie religieuse d’un chamane péruvien ». Je les
avais souvent admirées, frappé par leur ressemblance avec mes propres visions
hallucinatoires. Mais cette fois-ci, en ouvrant le livre, je restai bouche bée.
Il y avait non seulement des escaliers en zigzag, des lianes
entrelacées ou des serpents torsadés dans presque chaque image, mais
aussi des doubles hélices, comme celle-ci :
Peinture de Pablo Amaringo
(détail)
C’était ahurissant. Il
y avait là, au beau milieu d’une imagerie chamanique réputée, des
doubles hélices, mais personne ne semblait
avoir remarqué leurs liens possibles avec la biologie moléculaire. Une
correspondance aussi manifeste devait sûrement avoir déjà été remarquée, me
dis-je. Et si tel n’était pas le cas, je n’étais sûrement pas la personne digne
de la découvrir. Avais-je entrevu là quelque chose que j’étais censé ne pas
voir ? Je me rappelai que les dragons de Michael
Harner l’avaient averti qu’ils lui donnaient une information réservée aux
mourants et aux morts.
Subitement, une peur
irrationnelle m’envahit, et je sentis le besoin urgent de partager mes idées
avec quelqu’un. Je téléphonai à un vieil ami et me mis à lui débiter les
correspondances que j’avais trouvées au cours de la journée : les jumeaux,
les serpents cosmiques, les échelles d’Eliade, les doubles hélices
de Campbell et celles d’Amaringo. Mon ami écouta patiemment, puis me suggéra de
tout noter.
Je suivis son
conseil. Alors que je jetais sur le papier tout ce que je venais de découvrir
sur le langage de l’ADN, je me souvins du premier verset du premier
chapitre de saint Jean : « Au début était le Logos »
- le Mot, le Verbe, le Langage. »
En fait, c’est la Création
tout entière qui est le Langage du Seigneur !
« Cette nuit-là,
j’eus de la peine à m’endormir.
Au cours des semaines
qui suivirent, je fus obsédé par les serpents et par l’ADN, et me
mis à voir des échelles partout : dans les parquets, dans les carrelages,
dans les fenêtres à carreaux, dans les rayons des bibliothèques, dans les
escaliers, dans les clôtures, dans les barrières, dans les ponts, dans les
antennes, dans les pylônes électriques, dans les rails de chemin de fer, dans
les claviers de piano et les frettes de guitare. Il m’apparaissait que le motif
de la vie se cachait non seulement dans les feuilles et les arbres, mais dans
nos symboles et nos artefacts. Mais chaque fois que j’essayais d’en parler aux
gens autour de moi, en leur montrant par exemple le motif d’échelle formé par
les fenêtres de la pièce où nous nous trouvions, ils regardaient d’un air
incertain, comme s’ils ne voyaient pas.
Je continuai à lire
des ouvrages de mythologie et de biologie moléculaire. Chaque jour
apportait un nouveau lot de correspondances. J’émergeais de longues séances dans
mon bureau en déclamant des phrases comme : « La duplication d’une double hélice
d’ADN donne deux doubles hélices qui sont des copies exactes l’une de l’autre,
c’est-à-dire des jumelles, et les peuples indigènes associent les jumeaux à la
création de la vie depuis des millénaires ». Ou : « Francis Crick, le
co-découvreur de la structure de l’ADN, dit que les
formes de vie les plus simples sont d’une telle complexité qu’elles n’ont pu
émerger sur Terre par pur hasard. C’est pourquoi il suggère que
la vie à base d’ADN est d’origine extra-terrestre
- tout comme les peuples indigènes affirment que le serpent est d’origine
cosmique. »
Ma femme écoutait
avec inquiétude ces fragments de savoir réarrangés ; ils lui semblaient relever
davantage de la folie que d’un bricolage inspiré.
Mais dans ma folie il
y avait de la méthode. Alors que le regard rationnel tend à séparer les
choses pour les comprendre, je cherchais au contraire à appliquer à la réalité
une vision stéréoscopique, en lisant en parallèle des livres sur
le chamanisme et sur la biologie moléculaire. Et ça marchait !
Plus j’avançais, et plus je voyais clair et riche. Seul ennui, cette démarche
ouvrit les vannes à des correspondances étranges ou extravagantes, dont le
déluge m’emporta.
Je ne citerai que
quelques exemples.
Les taoïstes chinois
représentent le Yin et le Yang, Principe vital d’origine cosmique,
par l’enroulement de deux formes serpentines et complémentaires :
Le Tai Chi, principe ultime de toute chose
Selon le biologiste
moléculaire Christopher Wills, "les deux chaînes d’ADN ressemblent à deux
serpents enroulés autour d’eux-mêmes dans une sorte de rituel amoureux". En
effet, l’ADN est une seule molécule constituée de deux chaînes complémentaires.
C’est parce qu’il est à la fois simple et double qu’il peut être
dupliqué :
Dans les traditions
mythologiques, bon nombre des serpents cosmiques sont figurés comme étant
à la fois simples et doubles. Voici, par exemple, le serpent cosmique des
anciens Égyptiens :
Les serpents
mythiques sont souvent énormes. La tête du monstre-serpent Typhon
(mythologie grecque) touche les étoiles ; le poisson-oiseau du taoïste
Chuang-Tsu mesure « je ne sais combien de milliers de stades » ; certaines
représentations africaines du serpent Ouroboros le montrent faisant le
tour de la terre. Mais l’ADN des cellules humaines n’est pas en reste.
L’ADN d’une seule cellule aurait, si on le déroulait,
deux mètres de long, soit un fil qui serait un milliard de fois plus long que
large - comme si, toutes proportions gardées, votre petit doigt
s’étendait de Paris à Los Angeles. Si l’on pouvait
attacher tous les fils d’ADN d’un corps humain les uns aux autres, ils formerait
un filament de deux cent milliards de kilomètres de long -l’équivalent de
soixante-dix allers et retours entre Saturne et le Soleil.
Sur la piste du
serpent, il est facile de se perdre.
Je m’y suis donc
perdu, tel un astronaute hypnotisé par ce qu’il découvre à travers son hublot.
Une dizaine de semaines plus tard, cependant, ma femme réussit à me convaincre
qu’il était temps de redescendre et de rapporter aux autres ce que j’avais vu.
Pour revenir sur
Terre, j’entrepris d’étudier la biologie moléculaire de la même manière
que j’avais étudié le chamanisme : en lisant beaucoup et en
prenant des notes catégorisées. Par ailleurs, je résolus qu’après tant d’années
d’incrédulité systématique, j’allais prendre les chamanes au mot. Je me mis donc
à explorer la biologie moléculaire avec le rationalisme comme véhicule et le
chamanisme comme boussole.
Les chamanes
amazoniens affirment que certaines
plantes psycho-actives [contenant des molécules
agissant sur le cerveau humain] influencent les
esprits de façon précise. Ils disent, par exemple, que « le
tabac donne aux esprits un "appétit quasi insatiable" pour leur "feu" ».
Je partis à la
recherche d’une connexion analogue entre la nicotine et l’ADN d’une cellule
nerveuse du cerveau humain, et trouvai que lorsqu’une
molécule de nicotine s’insère dans le récepteur nicotinique d’une cellule
cérébrale, elle provoque un influx d’atomes électriquement chargés qui incitent
l’ADN à construire d’autres récepteurs nicotiniques.
Donnez de la nicotine à l’ADN de
votre cerveau, et il en redemande,
aussi insatiable de tabac que le sont les
esprits ! »
La preuve est ainsi apportée que le
tabagisme est un penchant qui effleure la vie intuitive ; c’est la
raison pour laquelle il subsiste après la mort !
« Il me fallut
plusieurs semaines pour trouver, puis comprendre, les différents fragments de
savoir scientifique concernant les récepteurs neurologiques et la stimulation de
l’ADN par la nicotine. Mais au bout du compte, je me trouvai avec, en mains, une
traduction des notions chamaniques en concepts scientifiques actuels, qui
les rendait compréhensibles et démontrait leur pertinence.
Je passai une année à
explorer la biologie moléculaire. Il me serait difficile de dire ici tous
les points où elle recoupe le chamanisme : ces deux domaines de connaissance,
qui semblaient séparés jusqu’à présent, s’emboîtent à de multiples niveaux. J’ai
essayé d’en faire la démonstration détaillée dans un livre, « Le serpent
cosmique, l’ADN et les origines du savoir ».
Peu après que j’eus
fini de rédiger cet ouvrage, en Juillet 1995, je fis le voyage du Pérou pour
discuter des conséquences éventuelles de mes hypothèses avec les représentants
de plusieurs organisations indigènes. Si elles étaient vérifiées, en effet, cela
signifierait que les peuples indigènes disposent, à travers les visions de leurs
chamanes, d’un savoir bio-moléculaire d’une valeur inestimable.
La première fois que
j’en parlai aux étudiants indigènes de l’École pour l’éducation bilingue et
interculturelle d’Iquitos, un seul d’entre eux, du fond de la salle, prit la
parole : « Vous avez finalement compris, me dit-il, que ce que nous disons est
vrai. Mais si vos collègues scientifiques prennent notre savoir au sérieux, qui
nous garantit qu’ils agiront de manière éthique ? La façon dont ils se
sont comportés jusqu’à présent ne nous rassure guère, d’autant que travailler
avec les esprits sans éthique est suicidaire. »
Je lui répondis que la
question était bonne, mais qu’ils allaient devoir y réfléchir eux-mêmes.
C’est en effet l’une
des choses que j’ai découvertes au cours de cette enquête : que nous soyons
biologistes moléculaires, Indiens d’Amazonie ou anthropologues, nous avons tous
tellement à apprendre, et d’abord les uns des autres.
Dix mois plus tard, je
retournai à nouveau à Iquitos. Le motocarro me déposa devant le dortoir des
étudiants indigènes qui m’avaient invité à faire un nouvel exposé. Je me
dirigeai vers la salle de réunion, où quelque quatre-vingts jeunes hommes et
jeunes femmes étaient en train de s’asseoir sur des bancs alignés devant un
tableau noir. C’était un vendredi soir, la nuit était moite, les étudiants me
semblaient un peu distraits.
Pour animer
l’assistance, je lui demandai d’emblée si elle avait des questions. Après un
long silence, quelqu’un lança : « Nous aimerions savoir si vous avez pu tester
les hypothèses que vous nous avez présentées ici l’an passé ».
Promettant de ne point
éluder la question, je commençai par évoquer devant les étudiants l’histoire de
la vie sur Terre telle que la science la présente aujourd’hui, depuis la
naissance de notre planète sous la forme d’une boule de magma, jusqu’à
l’apparition à sa surface, il y a quatre milliards d’années, de la vie
évolutive : des bactéries qui se sont transformées peu à peu en plantes, en
poissons, en amphibiens, en reptiles, en dinosaures, en mammifères, et enfin en
singes et en hominidés. Je leur dis que le cerveau des
hominidés avait triplé de volume au cours des derniers quatre millions d’années :
de ce que l’on sait de l’histoire de la biologie, jamais un autre organe ne
s’est développé de façon aussi spectaculaire. Je leur parlai de fossiles, des
techniques de datation au carbone 14, je leur expliquai que la science elle-même
est un phénomène récent : la biologie n’a que deux cent ans, la technique du
carbone 14 a moins de soixante ans, et le rôle de l’ADN est compris depuis moins
d’un demi-siècle.
Je leur dis que la
biologie est née par opposition à la religion et se fonde sur l’idée qu’il n’y a
dans la Nature aucune intelligence ni aucun plan. Je leur montrai des dizaines
de pages de publicité de compagnies pharmaceutiques, arrachées dans des numéros
récents de la revue Nature, couvertes de doubles hélices et autres références à
l’ADN. Dans le monde matérialiste où je vis, leur dis-je, la biologie est un
business. Elle considère les deux serpents entrelacés comme un simple produit
chimique, un vulgaire « acide désoxyribonucléique ». Elle ne peut admettre que
l’ADN soit animée par une conscience, sauf à contredire les présupposés
fondateurs de la discipline. Jacques Monod dit que l’on ne peut envisager que la
Nature ait un but, « fût-ce provisoirement ou dans un domaine limité », à moins
de sortir du domaine même de la science.
Bref, leur dis-je, il
faudrait, pour que mes hypothèses puissent être testées, que des biologistes
moléculaires institutionnellement respectés trouvent de l’information
bio-moléculaire dans les hallucinations des ayahuasqueros - mais comme
ces biologistes institutionnels ne peuvent admettre d’y trouver une telle
information, mes hypothèses ne peuvent pour l’instant être testées !
Cette fois-ci, les
questions fusèrent. Par exemple : « Docteur, est-ce que vous pensez que dans dix
mille ans nos têtes seront beaucoup plus grandes qu’aujourd’hui ? ». Je répondis
que je n’en savais rien, mais que tout était possible. Jusqu’à ce qu’une
dernière question surgisse du fond de la salle : « Est-ce que vous êtes en train
de nous dire que les scientifiques nous rattrapent ? - Oui, répondis-je,
exactement ».
Sur la piste du
serpent, on finit par s’apercevoir que souvent les choses sont à l’envers,
ou sens dessus dessous, ou les deux à la fois.
Extrait du livre
« Le Serpent Cosmique » de Jeremy Narby :
« Voici un fait que
j’appris au cours de mes lectures : nous ne savons pas comment fonctionne notre
système visuel. Lorsque vous lisez ces mots, vous ne voyez pas réellement
l’encre, le papier, vos mains et le décor qui vous entoure, mais plutôt une
image interne à trois dimensions qui les restitue presque parfaitement et qui
est construite par votre cerveau. Cette page émet des photons, qui viennent
frapper la rétine de vos yeux, qui les transforment en information
électrochimique, que les nerfs optiques relayent au cortex visuel situé à
l’arrière de la tête.
Là, tout un ballet de
cellules nerveuses réagit à ces données, qu’elles traitent par catégories
séparées (forme, couleur, mouvement, profondeur, etc.). Comment le cerveau fait
pour refondre en une image cohérente cet ensemble d’informations préalablement
catégorisées demeure un mystère plus ou moins total.
Ce qui veut aussi dire
que le siège neurologique de la conscience reste totalement inconnu. [...]
D’un bout à l’autre du
matériel fourni dans les volumes de ce travail consacré à la mythologie
primitive, orientale et occidentale, les mythes et les rites relatifs aux
serpents apparaissent fréquemment, et avec une signification symbolique
remarquablement consistante. Partout où la Nature est
vénérée comme étant animée en elle-même, et donc divine de façon inhérente, le
serpent est révéré comme son symbole. [...] Héraclite d’éphèse
disait de l’oracle pythien (du grec puthôn, serpent), qu’il “ne parle pas, ne
dissimule pas, mais donne un signe”. [...]
Comme l’axis
mundi des traditions chamaniques, l’ADN possède la forme d’une échelle
torsadée (ou d’une vigne...). Et, selon mon hypothèse, l’ADN devrait être,
comme l’axis mundi, la source du savoir et des visions chamaniques. Cependant,
pour en être sûr, il me fallait comprendre comment il pouvait transmettre de
l’information visuelle. Or, je savais que l’ADN émettait des photons,
c’est-à-dire des ondes électromagnétiques, et j’avais encore en tête les paroles
de Carlos Perez Shuma, qui avait précisément comparé les esprits à des “ondes
radio” (« une fois que tu allume la radio, tu peux les capter. La même chose
pour les âmes, avec l’ayahuasca et le tabac, tu peux les voir et les
entendre »). Je me mis ainsi à parcourir la littérature sur les photons
d’origine biologique, ou “biophotons”.
Au début des années
1980, des chercheurs démontrèrent, grâce à la mise au point de techniques de
mesures sophistiquées, que les cellules de tous les
êtres vivants émettaient des photons à un taux allant jusqu’à une centaine
d’unités par seconde et par centimètre carré de surface de tissu. Ils montrèrent
également que l’ADN était la source de ces émissions.
Au cours de mes
lectures, je découvris avec stupeur que la longueur
d’onde à laquelle l’ADN émettait ces photons correspondait exactement à la bande
étroite de la lumière visible : “Sa distribution spectrale varie au moins
de l’infrarouge (à environ 900 nanomètres) à l’ultraviolet (jusqu’à environ 200
nanomètres)”.
La piste était
sérieuse, mais je ne savais pas dans quelle direction la suivre. Je n’avais
aucune preuve que la lumière émise par l’ADN était celle que les chamanes
voyaient dans leurs visions ; de plus, il y avait un aspect fondamental de cette
émission de photons que je ne saisissais pas : selon les chercheurs, sa
faiblesse était telle qu’elle correspondait ”à l’intensité d’une bougie située à
une dizaine de kilomètres”, mais, en même temps, elle exhibait “un degré
étonnamment élevé de cohérence, comparable à celle d’un laser”. [...] »
[Suite dans le livre
de Jeremy Narby…]
« Le Serpent
cosmique »
Couverture de l’ouvrage
de Jeremy Narby
Couverture de l’ouvrage
de Jeremy Narby
Au sujet des serpents
Extrait du Livre
« Zoroastre » :
« Les
oiseaux appartiennent à Vayn, les poissons, les
serpents
et les grenouilles à la gracieuse Anahita .»
Saadi
s’approcha doucement et aperçut un petit serpent gris-vert portant sur sa fine
tête une couronne en Or. Il se prélassait au Soleil et levait sa tête gracile,
faisant ainsi briller sa petite couronne.
Saadi eut
beaucoup de mal à retenir un cri de Joie. Et sur le sol, il entendit un
bruissement; un second serpent, un peu plus grand que le premier, portant lui
aussi une petite couronne, s’avança et se glissa gracieusement sur la pierre.
L’ondine s’était approchée à la nage et regardait les yeux brillant ce ravissant
tableau.
Les
serpents semblaient s’entretenir ; ce faisant,
leurs corps brillants s’enroulaient
et se déroulaient. Et subitement, sans aucun motif extérieur, ils
partirent dans différentes directions.
Alors
Saadi laissa éclater sa Joie. Il remercia l’ondine de lui avoir montré cette
Merveille. Puis il voulut savoir pourquoi les
serpents
avaient le droit de porter une couronne.
-
« Pourquoi les hommes portent-ils des couronnes ? », dit en riant l’ondine.
- « Parce
que ce sont des Princes ! », répondit rapidement Saadi.
-
« Est-ce que les deux serpents sont-ils aussi des princes ? »
- « Ils
sont roi et reine. Ahuramazda leur a donné plus qu’aux autres serpents.
C’est pourquoi ils doivent aussi être des exemples pour les autres. Ils le font
fidèlement. Chez les animaux, il n’y a pas de princes égoïstes et avides. »
- « Oh,
mais qu'est-ce que c'est ? », demanda Nahomé.
D'un
petit palmier descendait un Serpent
d'Argent, véritable merveille d'orfèvrerie.
-
« Est-ce qu'il existe des animaux de cette sorte ? »
- « Oui,
au Pays d'où Je viens, il y a beaucoup de serpents.
Mais ils n'ont jamais fait de mal ni
aux êtres humains ni aux bêtes. Ils se contentent d'être
beaux. »
La présence de
plusieurs entéaux dans une même plante
Lors des apparitions
d’« esprits végétaux » (qui sont, en fait, des entéaux des plantes) l’on
peut voir des particularités intrinsèques à la nature des plantes. C’est le cas
des êtres entéalliques associés, faisant, comme pour les âmes animales,
ressortir la notion d’âme-groupe.
Il semble, en effet,
parfois, que les chamanes reconnaissent, pour une seule et même plante,
la présence de nombreux entéaux. Pour certaines d’entre elles, il est
possible de dénombrer ainsi des entéaux des racines, des entéaux des
feuilles et d’autres pour les écorces, etc… Ces êtres sont, le plus
souvent, d’apparence humaine, souvent décrits comme de petits enfants ou
des êtres minuscules. Ce sont les elfes et les lutins, bien connus
du folklore européen.
Ces nombreux
petits entéaux perçus, avec ou sans ayahuasca, lors de leurs visions, par
les chamanes, pourraient, d’un point de vue « scientifique », être considérés
comme des perceptions personnalisées de la diversité
génétique de chaque plante.
Pour comprendre ce
point de vue, il suffit de se débarrasser des préjugés anthropocentriques, qui
empêchent de percevoir la plante autrement que sous l’aspect d’une
individualité. Car il est important de comprendre que
la notion d’individu ne s’applique pas, avec la même
rigueur que pour les animaux, aux plantes. Les plantes sont, à la fois,
une(s) et potentiellement multiples.
En effet, si l’on
découpe une plante en plusieurs morceaux, il sera possible, dans
de bonnes conditions, d’obtenir, à partir des racines ou des branches, de
nouvelles plantes ; c’est le bouturage et le marcottage bien
connus des horticulteurs et des jardiniers, mêmes amateurs.
L’on peut voir la
même chose, au niveau animal inférieur, lorsque, avec une bêche, l’on
découpe involontairement un ver de terre ou une néréis des sables pour en faire
deux !
Il serait donc plus
opportun de se représenter la plante comme un ensemble de nombreuses
plantes potentielles, plutôt qu’un être unique individuel.
Mais, d’un point de
vue terrestre, c’est la génétique qui corrobore le mieux cette vision des
végétaux. En effet, le génome des plantes tend à
montrer que, rigoureusement considéré, les
plantes ne sont pas des êtres individuels.
Tout d’abord, la
diversité génétique au sein de la plante peut se manifester, chez certaines
plantes, par un nombre de gènes allant de 12 à 200 gènes. Il est possible à une
plante de posséder des différences génétiques, montrant des gènes de formes
différentes, en fonction de la répartition de ceux-ci dans la structure
végétale. C’est ainsi qu’il a été montré que des arbres de la forêt
équatoriale de Guyane possédaient des génomes différents au sein de leurs
frondaisons.
La diversité
génétique au sein des grands arbres de la forêt est très grande. Cela tend à
montrer que ces grands arbres peuvent être comparés à des colonies d’entéaux
végétaux, correspondants à des génomes différents.
Un autre élément
plaidant en la faveur de la nature d’âme-groupe des plantes sont les
réitérats. Selon le concept de la réitération les rejets d’un arbre
sont à considérer comme des arbres plus jeunes poussant sur des plus vieux,
stipulant que les
arbres devraient être reconnus comme des architectures d’entités
végétales croissant les unes sur les autres, tout comme une colonie d’insectes.
Partant de là, il
serait plus juste de considérer les plantes sous l’aspect de colonie, de
sous-unités autonomes constituées par l’ensemble des réitérats.
Or c’est bien une
telle vision des plantes que l’on perçoit sous l’effet de l’Ayahuasca. Pour se
faire une idée plus précise de cette réalité, l’ouvrage « Ayahuasca vision»
de Pablo Amaringo et Luis Eduardo Luna, montre des plantes anthropomorphes avec
de multiples visages.
L’on n’a donc pas
toujours l’équation : 1 plante = 1 âme, mais, pour les grandes plantes,
c’est souvent : 1 plante = de nombreuses « âmelettes », constituant ensemble une
« âme-groupe » [« Gruppenseele »].
Ajoutons encore à
cela – ce que la science ni même les chamanes ne semblent encore avoir reconnu -
que les fleurs abritent des elfes féminins, tandis que les
arbres abritent des elfes masculins…
Cela aussi confirme
la diversité des entéaux sur une même plante, car si un grand entéal
masculin peut correspondre à un grand arbre ses nombreuses fleurs
pourront abriter de nombreux petits entéaux féminins…
Cet Univers des
âmes-groupes, d’une grande complexité, attend encore d’être précisément
décrit, en partant d’En Haut…, de sorte que la science humaine,
partant d’en bas arrive, au milieu, à faire la connexion…
L’évolution
du Germe d’Esprit humain
Après le compte-rendu
de ces expériences amazoniennes et cette tentative d’appréhension du phénomène
en partant d’en bas, considérons, maintenant, en partant d’en haut,
la chose d’un point de vue non plus naturel – ni même « scientifique »
mais, cette fois, « carrément » spirituel.
Et considérons notre
course en tant que Germe d’Esprit humain à travers la Création :
Nous les êtres
humains de la Terre, nous sommes, en fait, des germes d’esprits incarnés
en cours d’évolution dans la
matière grossière.
Le
germe d'esprit
humain est, tout d'abord, inconscient, mais il doit devenir conscient
de lui-même. Sinon, à quoi bon vivre ? Pour cela, il a besoin d’une
évolution. Cette
évolution se passe dans les plans
inférieurs à celui du Spirituel, en allant jusqu’au plus bas, dans
la matière la plus grossière, agissant sur lui comme la terre qui
l’entoure agit sur un grain de blé.
Notre But est donc de
progressivement devenir conscients de nous-mêmes vers l'état d'esprit
humain accompli. Pour cela, nous nous entourons d’enveloppes,
adaptées aux environnements correspondants, incluant la matière la plus
grossière, dans laquelle nous séjournons présentement.
Si nous observons
bien, nous pouvons voir que notre processus
d'évolution se manifeste tout
à fait nettement en direction de l'extérieur.
Ceci est donc la
réponse à la question de Jeremy Narby : « Vers
l’intérieur ou vers l’extérieur ?».
Pour mieux comprendre
cela, nous avons seulement besoin d'observer certaines races humaines,
qui, aujourd'hui encore, se trouvent sur la surface de notre planète, la
Terre.
Les peuples dits
primitifs
Nous pouvons y voir
des peuples considérés comme étant « des plus primitifs », parmi lesquels
se trouvent même des peuples dits « sauvages ». Le germe d’esprit
individuel de chaque être humain de ces peuples n'est pourtant pas depuis moins
longtemps dans la matière
grossière que ceux d’autres êtres humains appartenant à des peuples considérés
comme évolués, mais si ces êtres humains sont tels qu’ils le sont, c'est
seulement parce qu'ils ne se sont pas maintenus dans le Processus normal de l'évolution
spirituelle.
Il existe aussi une
autre possibilité : Après une ascension
spirituelle préalable déjà effectuée dans l'en
deçà gros-matériel ou dans l'au-delà
fin-matériel, ils ont, de nouveau, tellement régressé qu'ils n'ont pu
être incarnés que là où ils se trouvent.
Donc, ils ont soit
stagné soit rétrogradé.
Il s’agit donc là de
peuples se tenant, sur l’échelle
de l’évolution spirituelle, bien plus bas que les « Indiens »
d’Amazonie.
Ces êtres humains
faussement considérés comme « primitifs » sont donc, de par leur
propre fait, soit encore, soit de nouveau, à un bas
niveau d’évolution (insistons
bien sur le fait que l’on ne parle ici que d’évolution
spirituelle, ce qui n’a que peu à voir avec le développement technique ou
l’érudition), les faisant, à tort, passer pour des « primitifs »,
c’est-à-dire des êtres qui ne seraient qu’au commencement de leur
évolution spirituelle.
Au stade où nous en
sommes, cela ne peut plus exister, sur la Terre, depuis bien longtemps…
Ce que voient
eux-mêmes les voyants des peuples dits « sauvages » de leur entourage
extra-gros-matériel correspond donc à ce qu’ils sont eux-mêmes
intérieurement.
Si l’on veut
comprendre ce que peuvent voir des êtres humains « primitifs » dotés du
Don de la Clairvoyance il faut, tout d’abord, être bien conscient du fait que
l’on ne peut {perce}voir, dans l’Au-delà, que ce qui se trouve au même
niveau que soi-même ou bien alors juste au-dessus.
Cela consiste à
tendre à s’élever au-dessus de soi-même…
« Et quand Tu seras arrivé au Sommet de la Montagne…
continue à monter ! »
Les Principes de Base
régissant la Clairvoyance
Cette possibilité de
voir ou pressentir uniquement le degré se trouvant
juste au-dessus de son propre degré découle d’une Loi de la Création,
appelée la Loi de l’Ascension.
Selon cette Loi, l’on
peut toujours voir le barreau immédiatement supérieur de l’échelle
de l’Ascension Spirituelle, mais pas plus haut !
C’est pour cela que
des âmes se tenant plus bas, parce que, par paresse spirituelle, elles se sont
laissé aller ou n’ont pas fait l’effort de s’élever, ne peuvent, par
clairvoyance, pressentir ou voir que, de façon correspondante à la Loi
d’Attraction du Genre Semblable, des « entités » existant sur les bas
plans de l’Au-delà.
Des médiums ou des clairvoyants, il y en a, en effet,
parmi toutes les races, quel que soit le degré auquel elles sont
parvenues.
Cela est voulu par l’Omnisagesse
Divine,
car c’est ainsi que chaque race peut s’élever du degré qu’elle a déjà
atteint jusqu’au suivant se trouvant juste au-dessus d’elle.
Telle est la véritable raison d’être de la
Clairvoyance et de la Médialité, lesquelles ne sont pas des Facultés destinées à
tous mais seulement à certains en fonction du Service qu’ils
doivent rendre à l’humanité.
Un être humain devant spirituellement guider un
peuple peut donc s’appuyer sur les {voyances des} Clairvoyants de son peuple
pour pouvoir ainsi lui montrer le Chemin.
Les clairvoyants
doivent donc, à des moments bien déterminés, être des
portails
ouverts en vue de l'évolution
ultérieure du peuple considéré.
Ils sont ainsi comme
des échelons
pour l'échelle
de l'ascension
spirituelle,
devant être parcourue par chaque peuple
et chaque être humain individuel.
La Vision des
clairvoyants voyant tout en bas
Les voyants des peuples ou races humaines qui ne
peuvent réellement voir qu’au niveau le plus inférieur, ne voient que ce
qui se trouve le plus en bas, c’est-à-dire les démons. Les démons
sont les formes prises par le vouloir d’intuition des êtres humains.
Chez ces peuples n’existe, de façon prédominante, que
la crainte et l'adoration des démons. Car c'est tout ce que les
voyants de tels peuples sont capables de voir ou de pressentir.
En fait, ils ne
vénèrent donc – ce que, bien sûr, ils ignorent ! - que des « entités »
« créées » – ou, plutôt formées – par eux-mêmes !
Chez eux, l'esprit,
demeuré en friche ou bien rabougri, est, bien évidemment, encore
ou bien de nouveau, aveugle et sourd. De tels êtres humains ne
sont pas capables de « voir » avec l'œil spirituel.
Du reste, aucun
être humain, se trouvant, aujourd’hui, sur la Terre, n’est encore capable
de voir avec ses yeux spirituels !
Celui qui se trouve
encore tout en bas de l’échelle
ne peut, bien évidemment, pas, non plus, voir avec l'œil entéallique
(permettant de voir les êtres entéalliques de la Nature ou « entéaux »),
pas plus qu'avec l’œil fin-matériel (permettant de voir les âmes
désincarnées), mais, au contraire, exclusivement avec l'œil gros-matériel
(permettant de voir la matière grossière).
Exemple de
clairvoyance au niveau le plus bas
Ils vivent dans des
contrées sauvages, dans la jungle des forêts primaires ou bien dans la savane.
De ce fait, ils sont confrontés à l’adversité d’autres êtres humains
« sauvages » comme eux, des animaux, eux, réellement sauvages et ils doivent
aussi affronter les éléments de la Nature sauvage, elle aussi. Le résultat en
est que leurs yeux gros-matériels (donc ceux de leur corps physique
terrestre) se sont de plus en plus aiguisés ; la conséquence en est que,
peu à peu, ils en arrivent à pouvoir distinguer la matière grossière plus
fine et même la matière grossière la plus fine.
Il s’agit là de deux
genres appartenant toujours à la matière grossière mais ordinairement non
visibles des yeux terrestres. Beaucoup de voyants désignent ces deux genres ne
faisant pas encore partie du réel Au-delà par le « Monde astral ». En
réalité, l’on peut dire, si l’on emploie cette désignation, que cela recouvre
l’Astral inférieur (matière grossière moyenne) et l’Astral
supérieur (matière grossière fine).
Ils peuvent donc voir
le Monde astral où se trouvent les formes-pensées, oui, mais
toujours avec l’œil gros-matériel terrestre !
Ainsi,
perçoivent-ils, tout d'abord, les fantômes.
Les fantômes ne sont même pas encore des démons (lesquels ne se
trouvent que dans la matière fine), mais ce sont des figures
uniquement formées par les pensées de crainte ou de peur ressenties
par eux-mêmes et aussi entretenues par elles.
Ces fantômes,
sans aucune vie propre, sont complètement
dépendants des pensées des êtres humains. Ils sont attirés ou repoussés
par elles. Ici, encore une fois, agit la
loi de la Force d'attraction
du Genre Semblable. La crainte attire constamment ces figures nées des
pensées de crainte ou de peur, de sorte qu’elles fondent littéralement sur les
êtres humains craintifs.
Les démons nés
de la peur
Lorsque la peur est
encore plus profondément ressentie, elle provient alors de l’intuition
des êtres humains et donne naissance à de véritables démons.
Lorsque l’on connaît
ce fait, l’on n’est pas étonné des expériences réellement vécues par certains
êtres humains consommant de l’ayahuasca ou d’autres substances dites « psycho-actives ».
Ils sont, du fait que leur âme n’est plus protégée par leur corps gros-matériel,
tout simplement la proie de leurs propres démons et/ou fantômes,
étroitement connectés à ceux des autres.
Ce qu’ils ne savent
pas c’est que, dans de tels environnements, rien n’est réel, en ce
sens que rien n’est réellement vivant, qu’eux-mêmes ! Une âme
animale, pourtant largement encore inconsciente (un animal peut parvenir à la
conscience de son entourage, mais ne sera jamais conscient de
lui-même), est bien plus vivante que de tels démons nés des émotions
négatives des expérimentateurs.
Et si un
expérimentateur d’une telle substance s’imagine pouvoir porter un jugement
objectif au sujet des expériences procurées par l’ingestion de tels
« psychotropes » il se trompe largement, car, le plus souvent, le jugement qu’il
portera ne concernera que sa propre vie intérieure ; c’est elle
qu’il jugera et non le phénomène en soi, qu’il est impossible de
véritablement appréhender de l’extérieur.
étant donné que les démons
et les fantômes sont reliés à leurs auteurs, donc les êtres humains
fortement craintifs ou peureux, par des fils de nutrition extensibles, chaque
poltron entre ainsi, constamment, indirectement en liaison, aussi, avec la masse
des craintifs et des angoissés, reçoit de ceux-ci un nouvel afflux, qui ne fait
que multiplier encore sa propre crainte et sa propre angoisse, et, pour finir,
peut même le pousser jusqu'au désespoir, et même, encore plus, jusqu'à la
folie.
C’est pourquoi
personne ne doit être poussé vers de telles expériences, car chacun ne
conserve sa protection que pour autant qu’il reste tranquillement dans
son corps gros-matériel, sous l’emprise terrestre…
L'intrépidité, en
revanche - donc le Courage - repousse de tels démons et fantômes, de
façon toute naturelle. C'est pourquoi l'intrépide a, comme c'est bien connu,
toujours l'avantage de son côté. « La fortune sourit aux audacieux », dit
fort justement le proverbe.
Pour mieux comprendre
ce que sont les démons, le récit d’une expérience vécue peut
s’avérer utile. Dans le livre
« Lao-Tsé » il est raconté comment Lao-Tsé avait reçu la Mission d’affronter
et de vaincre les démons, lesquels occupent, encore aujourd’hui, une
grande importance dans la culture et la tradition chinoise.
Le combat contre les
démons
Voici, en tant que
jeune homme appelé « Li-Erl », sa première expérience avec un démon :
« Les
yeux grands ouverts, Li-Erl contemplait le tableau qui s'offrait à ses yeux.
L'autre serviteur était couché par terre et un monstre d'un aspect répugnant
était agenouillé sur lui. Velu et hirsute, il rappelait une bête sauvage et ses
yeux injectés de sang y contribuaient également. Cependant, les mouvements et
l'habillement étaient entièrement humains. En ricanant, le monstre leva le
regard.
Puisque
nul trait du visage de Li-Erl ne bougeait, le démon perdit de l'assurance. De
nouveau, il lança un regard rapide sur le jeune homme, mais il détourna aussitôt
son regard. Ce faisant, il sembla au jeune homme que le démon diminuait.
à aucun moment, la peur ne le
saisit. Un désir de savoir ardent le pénétrait et l'obligeait à ne pas quitter
des yeux cette apparition toute nouvelle pour lui.
Il avait
appris que des démons existaient. Il en avait souvent entendu parler, mais n'en
avait encore jamais vus.
Il voulut
lui parler et le sommer d'abandonner le serviteur terriblement apeuré. Mais, à
sa propre surprise, il ne put prononcer un seul mot. Il lui sembla que quelqu'un
l'empêchait d'intervenir activement. Il fut contraint de regarder
inlassablement.
Maintenant, cela devenait évident : plus ses yeux perçants et scrutateurs
fixaient le monstre, plus ses contours se faisaient vagues. Il semblait diminuer
de plus en plus. Les yeux ardents s'éteignirent. Les bras armés de griffes
rétrécirent et lâchèrent ainsi la victime. Et l'apparition entière s'était
subitement évanouie ! Encore transi d'horreur, le serviteur couché à terre se
releva.
Li-Erl
s'apprêta à partir, profondément absorbé par de ce qu'il venait de voir et
d'éprouver. Les serviteurs éteignirent le feu et le suivirent. Ils se sentaient
plus en sécurité près de lui.
En
silence, le jeune homme s'assit en face de son maître qui, lui non plus, ne
prononça pas un seul mot. Et pourtant Li-Erl ressentit la compassion la plus
fervente de Lié-Tsé à son égard. Une merveilleuse vibration existait entre eux,
meilleure que la conversation la plus animée.
Les jours
suivants non plus on ne fit pas allusion à l'événement qui avait laissé une si
profonde impression sur l'âme de Li-Erl. Plus il y réfléchissait, plus il était
certain que son observation intrépide avait eu un effet
destructeur sur le démon. S'il venait quelqu'un qui, selon la Prophétie,
anéantirait les démons, il aurait à combattre avec des
armes spirituelles et non pas avec l'épée et la hache.
Que la
Bonté des Dieux envoie bientôt un autre démon sur son chemin, afin que Li-Erl
puisse mettre son savoir tout récent à l'épreuve ! Le jeune homme le souhaita à
d'innombrables reprises. Puis son désir fut exaucé.
Cette
fois, le démon l'affronta personnellement. Alors que, éloigné des autres, il
traversait une haute forêt, un monstre habillé en guerrier couvert de peaux, lui
barra le chemin en brandissant une pesante massue bardée de fer.
Au
premier instant, l'âme du jeune homme fut saisie d'effroi, l'aspect horrible
l'avait pris trop au dépourvu. Mais il reprit rapidement contenance. Il recula
d'un pas pour s'adosser à un arbre, puis appuya les mains sur son bâton de
voyage et fixa l'horrible monstre. Ce faisant, il pensait :
-
« Tu n'es pas une créature de Dieu. Le Plus-Haut ne
peut pas créer de telles figures ! D'où sors-tu alors ? »
Et le
démon hurla à tue-tête :
- « De Ton for
intérieur ! »
Le fait
que le démon réponde à une question non prononcée ne surprit pas Li-Erl.
Grâce à sa fréquentation des bons esprits, il en avait l'habitude. Mais le sens
de la réponse faillit ébranler son équilibre intérieur.
-
« Si une chose pareille est sortie de moi, quel aspect dois-je avoir ? »,
pensa-t-il, ahuri.
En même
temps, son attention s'était relâchée et le démon en profita pour s'approcher
dangereusement.
-
« Oh, tu crois avoir le jeu plus facile si tu me poses des énigmes sur mon être
intérieur », lui répliqua, à haute voix, un Li-Erl réveillé.
Et, sans
s'émouvoir, il dirigea ses yeux rayonnants sur l'ennemi. Et, comme la première
fois, la figure diminua lentement jusqu'à sa
disparition totale.
Li-Erl
fut secoué de frissons. Il avait appris bien des choses. Dans un tel danger, il
ne fallait pas un seul instant s'absorber dans des réflexions.
Pour vaincre les démons, il fallait être constamment
vigilant. Il fut convaincu de renfermer en lui-même la Force de la
Victoire. Donc, il ne dépendait que de lui que le
monstre puisse représenter un danger pour lui.
Le jeune
homme acquit la certitude de tout ceci. Mais autre chose ne cessait de le
préoccuper. Le démon avait affirmé être issu de son for
intérieur. Cette affirmation pouvait être un pur mensonge destiné à
détourner sa Vigilance. Mais le jeune homme avait le sentiment qu'une certaine
vérité y était cachée.
-
« Est-ce là mon for intérieur ? », demandait-il, sans arrêt.
Il se
creusa la tête à ce sujet des journées entières. Finalement, il résolut de
questionner son maître. à cet
effet, il lui fallut l'informer de sa double rencontre avec des démons, ce qu'il
avait jusqu'alors passé sous silence.
Le
vieillard écouta tranquillement. Et lorsque, enfin, Li-Erl lui posa la question
concernant l'origine du démon, question qui le touchait si fortement, Lié-Tsé
sourit discrètement.
-
« Le monstre avait raison. Il était le produit de Ton
for intérieur. Tout comme le premier que Tu as vu,
il avait été créé par des êtres humains. Là où
il était issu de la peur des serviteurs,
il avait pris forme dans cette peur et était revenu,
intensifié, vers eux. Chez Toi, ce ne fut pas la peur qui fit apparaître
le démon. Réfléchis, quelle a pu en être la cause ? »
-
« Mon propre désir ! », s'écria Li-Erl,
fortement surpris. « Certes, je ne pensais plus à autre chose qu'à rencontrer à
nouveau un tel monstre et à éprouver ma force sur lui. »
Puis il
retomba dans le silence, car ses pensées se succédaient sans interruption. »
Nul doute que cet
épisode de la vie du jeune Li-Erl, alias Lao-Tsé, ne constitue une
clef fondamentale pour la bonne compréhension des expériences vécues de
ceux qui, au cours de leurs « voyages » sous psychotropes, voient des
monstres et des dragons.
À noter que Gautama
Bouddha avait aussi, grâce à sa pureté
intérieure, le pouvoir de chasser, d’un seul acte intérieur de Confiance
en la Lumière, une armée de démons !
Hommes-médecines,
sorciers et chamanes
C’est ainsi que,
parmi les races dites « primitives », sont apparus les ainsi dénommés
hommes-médecine et les sorciers ou magiciens en tous genres.
Leurs castes furent fondées par des médiums ou des clairvoyants,
car ceux-ci étaient capables d'observer comment de telles figures,
considérées par erreur comme des entités personnellement vivantes,
des figures qui effrayaient grandement leurs co-êtres humains, pouvaient être
chassées ou mises en fuite par divers procédés ou artifices, ou par
des incantations destinées à favoriser la
concentration ou à susciter le
courage.
Même si, vu de
l’extérieur, nous n’y comprenons rien ou pas grand chose, lorsque l’on considère
le niveau de conscience qui est présentement le leur ou la capacité de
compréhension à laquelle ils sont actuellement parvenus, ils font quelque
chose de tout à fait naturel et judicieux.
Le problème est juste
que lorsque de tels magiciens ou hommes-médecine décèdent et qu’il
faut les remplacer, il arrive, bien sûr, que beaucoup de leurs continuateurs
n'ont pas, comme leurs devanciers, de réel
don médial, ni ne sont, non plus,
réellement clairvoyants, mais étant donné qu’à une telle fonction s'attachent,
simultanément, influence, prestige et gains variés, ces êtres humains peu
scrupuleux s’efforcèrent alors de conserver les avantages inhérents à l’enviable
statut.
Ces non-voyants
imitèrent alors, tout simplement, les comportements de leurs prédécesseurs,
sans en comprendre le réel bien-fondé, et, pour faire bonne mesure, y ajoutèrent
même encore quelques simagrées supplémentaires.
étant donné qu'ils n'accordaient
de valeur qu'à l’apparente satisfaction des autres membres de leurs tribus
respectives, ils devinrent ainsi ces fieffés escrocs qui ne cherchent en cela
que leur propre avantage, mais qui, au sujet de la réelle signification de ces
choses, n'ont eux-mêmes pas le moindre pressentiment.
Dans « Tintin au
Congo », lorsque Tintin, après avoir démasqué un tel sorcier imposteur, joue
ensuite son rôle à sa place, l’on voit une illustration de cela très nettement !
Il arrive donc que,
parmi les races humaines en lesquels se trouvent incarnés des germes d’esprits
ayant rétrogradé, nous ne puissions trouver, en premier lieu, que la
crainte et l'adoration des démons. C'est tout ce qu'en tant qu'entités non
gros-matérielles différentes des êtres humains ils sont capables de
voir.
Les clairvoyants
voyant un peu plus haut
Lorsque nous
considérons, maintenant, les degrés
d'évolution se trouvant un tant
soit peu plus haut, nous voyons des clairvoyants qui, que ce soit par
pure clairvoyance ou - ne serait-ce qu'inconsciemment - par pressentiment
- ce qui fait aussi partie de la vision
intérieure - sont capables de voir plus loin et donc plus haut.
Chez ces êtres plus hautement-évolués, les autres couches d'enveloppes sont
transpercées par l'esprit enchâssé, s'éveillant toujours plus, du dedans vers
le haut.
Toujours l’évolution
va vers l’extérieur.
Ils voient alors déjà
des entités plus sympathiques telles que les « bons génies » (formes-pensées
lumineuses), ou bien les connaissent par pressentiment, et, de ce fait,
perdent, peu à peu, l'habitude d'adorer les démons. Et cela continue
ainsi, en allant toujours plus haut. De
ce fait, cela devient toujours plus lumineux.
L'esprit,
lors d'une évolution normale,
perce toujours plus, à travers ses enveloppes, et gagne la faculté de
reconnaître des entités plus élevées et donc plus lumineuses.
Les entités en
questions sont alors, non plus des démons (expressions du vouloir de
l’esprit) ou des fantômes (expression des pensées ou formes-pensées) mais
des entéaux, des êtres
de la Nature, à commencer par les plus petits, et pour les peuples
vivant dans les forêts, les entités des bois,
qui sont, bien sûr, dans les forêts primaires, d’une exceptionnelle
diversité.
Les grands
Entéaux
Mais s’il existe de
petits entéaux des forêts et des plantes, il peut alors aussi exister,
sur des plans plus élevés, de grands Entéaux. Et c’est pour cela que,
plus tard, notamment les Grecs, les Romains, les Germains
en virent encore plus. Leur vision
intérieure arriva à dépasser le cadre de la matière, jusqu'à atteindre le Plan
de l'entéallique lui-même se
trouvant encore plus haut. Ils purent, du fait de leur
évolution plus poussée, parvenir
à voir les grands Guides de l'entéallique
et des éléments.
Voir, sentir, entendre les grands Entéaux fut,
pour l'évolution de l'époque
de ces peuples, le plus haut
sommet de ce qu'ils étaient capables d’atteindre. Il est compréhensible
que, par la suite, ces peuples
aient considéré les puissants guides
des éléments, dans leur
activité et leur
genre différent du leur, comme
étant les plus hauts qui puissent
exister et, même si ce fut à tort, ils les considérèrent alors comme des
Dieux.
Il est, maintenant,
bien connu que des voyants ne rapportent pas leurs visions de façon purement
objective, mais le font, au contraire, toujours de façon subjective.
Ceci est dû au fait que la vision
et l'écoute intérieures des êtres
humains, au moment de leur expression, dépendent toujours de leur capacité de
formulation et d'expression personnelle au moment de la relation. C’est
pour cela que les Grecs, les Romains et les Germains décrivirent, bien sûr, les
mêmes guides des
éléments et de tout l'Entéallique
en fonction des conceptions de leur entourage du moment. À part quelques
différences dans les descriptions, il s’agissait pourtant, chez tous ces
peuples, des mêmes grands Guides, différemment décrits.
Tout cela nous montre
que les différents cultes religieux de l'humanité,
dans leur étonnante diversité, ne proviennent absolument pas de la fantaisie,
mais reflètent, tout simplement, fidèlement
les subdivisions existant dans la vie
dans l'au-delà.
C’est ainsi que l'« homme-médecine »
d'une tribu pygmée ou le
chamane d’une
tribu indienne ont leur profonde raison d’être en regard du niveau
effectif alors atteint par leur peuple.
Les démons, les
Entités de la forêt
et celles de l'air, et aussi les
anciens « Dieux », sont, encore aujourd'hui, exactement les mêmes, ils se
tiennent aux mêmes places et ils ont la même
activité qu'à l’époque où ils
furent, pour la première fois, reconnus par des peuples entiers.
Et, en ce qui
concerne les entéaux des plantes, c’est bien cela que nous montrent les
expériences chamaniques avec ou sans ayahuasca !
De même, la plus
haute Forteresse de ces grands guides
de tous les éléments, l'Olympe
ou le Walhalla, entourée de l’Ashgard – le Jardin des Dieux -, ne
fut jamais une fable, mais, jadis, fut, au contraire, montrée et, par
quelques-uns, contemplée dans sa réalité.
La Mythologie
– Mot qui signifie spirituellement la « Parole des Dieux » -, qu’elle
soit nordique, germanique, grecque ou latine, nous
parle encore de cela.
Tout cela correspond
au niveau effectivement atteint par certains Peuples ayant eu et ayant
encore connaissance des Entéaux, lesquels existent bel et bien, même si
nous les avons relégués dans le royaume des contes, fables et légendes…
Encore plus haut !
Bien sûr, le
Spirituel – degré normalement atteint,
notamment, avec l’arrivée du Christianisme – se tient au-dessus de l’Entéallique,
mais comment un « enseignant » n’ayant
aucune connaissance de l’Entéallique
et des Entéaux peut-il prétendre enseigner à d’autres le
Spirituel!?!
Ne serait-ce pas comme quelqu’un voulant déjà
enseigner les équations du troisième degré alors qu’il ignorerait tout des
tables d’addition, soustraction, multiplication et division ?
Vis-à-vis des peuples vivant au-delà des mers,
les
missionnaires, les
prédicateurs et les
enseignants, soucieux d’une
réelle Ascension des Peuples ayant déjà la connaissance des
Entéaux,
doivent procéder
sans faire de bonds ni laisser de lacunes.
Cela implique qu’ils possèdent déjà eux-mêmes –
donc redécouvrent - la connaissance des
Entéaux,
que, du fait de leur étroit rationalisme dogmatique, ils avaient perdue.
Alors seulement ils fonderont leur activité
sur la Base du réel Savoir de l'évolution
naturelle se manifestant dans
toute la Création.
Ce faisant, ils œuvreront sur la Base de la
connaissance exacte des
lois de la Création exprimant la
Volonté divine, en fonction de l’échelle
de l’Ascension Spirituelle,
et pourront enfin « faire du bon Travail », c’est-à-dire, par leur activité,
susciter, dans la conscience des autres peuples, de réels progrès.
De tels progrès consistent à susciter
l’émergence non pas de croyants dogmatiques mais d’êtres humains
spirituellement libres, capables de, après avoir déjà reconnu les
Entéaux,
reconnaître aussi, en tant que marche plus élevée, par eux-mêmes, le
Spirituel,
donc des êtres humains qui soient spirituellement vivants.
Et c’est la même
chose pour les scientifiques ! Eux aussi doivent reconnaître le réel
Savoir entéallique des peuples indigènes, car un tel vivant Savoir
se tient déjà, dans la Création, bien plus haut que leur actuel mort savoir
purement intellectuel et matérialiste!
Alors seulement, loin
de s’opposer, le Savoir spirituel partant d’En Haut et le savoir
scientifique partant d’en bas ne feront plus qu’un!
David de la
Garde
Liens et sites sur le
chamanisme
Compte-rendus d’expériences :
Etc…
[1]
Langue des Incas.
[2]
À noter que la ville originelle de Cuzco, au Pérou, capitale
traditionnelle de l’Empire Inca, a la forme d’un Jaguar, dont
la dentition est formée par la forteresse de Sacsahuaman.
[3]
Le Récit d’où est tiré cet extrait est disponible à l’adresse : « EditionsCristal@aol.com ».
[4] « Bushmen « : « hommes de la jungle/des
bois/de la forêt » ; étant donné que ce mot désigne le nom générique d'un
peuple précis d'Afrique du Sud, il n'est pas nécessaire de le traduire en
français, sinon par "Bochiman{s}" (francisation du nom anglais).
[5]"Hottentott(en)": "Hottentot(s)"; peuple
nomade d'Afrique du Sud et de Namibie parlant une langue à clic.
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